dimanche 22 décembre 2019

G.D. Arnold, 14 ans, quitte le Gymnase pour faire la révolution ….


Etudiant au Gymnase, le jeune Arnold adhère aux idées qui animent les rues et quitte définitivement son établissement scolaire, où il était scolarisé depuis ses 7 ans, pour rejoindre un groupuscule politique.

Il est vrai que cela se passe en 1794 et que la scolarité du Gymnase est perturbée par la révolution qui agite la France….

C'est le début d’une trajectoire hors du commun dont Strasbourg a gardé des traces : la place Arnold, avenue de la Forêt Noire, face à l’Observatoire,  mais aussi une effigie sur le piédestal du Meiselocker (l’oiseleur) de la place St Etienne, une statue au cimetière St Gall. 





Si Georges Daniel Arnold, doyen de la faculté de droit de Strasbourg, ami et conseiller juridique de Lezay-Marnézia, préfet du département de Rhin-et-Moselle a eu une influence non négligeable sur l’interprétation du nouveau Code Civil Napoléon, il a aussi fortement marqué la culture alsacienne.

Homme de culture parfaitement trilingue, G. D. Arnold publie des « Notices sur les poètes alsaciens », ainsi que des poèmes en allemand. Pendant de longues années, il a pris l’habitude, lors de réunions d’amis comme d’entretiens familiers, de sortir de son portefeuille des bouts de papier où il note expressions, dictons, jurons et tournures propres au parler strasbourgeois. À ceux qui lui demandent : « Que voulez-vous faire de cela ? », il répond : « Vous verrez bien un jour ! »

Son chef-d’œuvre théâtral Der Pfingstmontag (Le Lundi de Pentecôte) paraît en 1816. Il s’agit de la première pièce de théâtre en dialecte alsacien (traduite par Roger Siffer et Suzanne Mayer en 2016) : une histoire compliquée de mariage protestant, située à Strasbourg en 1789, pleine d'anecdotes quasi ethnographiques, qui permet de mettre en évidence les différences dialectales entre le Hochdeutsch d'un universitaire de Brème et les différentes variantes d'alsacien. 


 Ce que Goethe saluera d'ailleurs dans un article élogieux dans sa revue Über Kunst und Altertum. L'ouvrage sera réédité onze fois entre 1816 et 1841, en Alsace, comme en Allemagne.





Pour en savoir plus :


Un trophée pour Moi, moche et bon !


La remise des prix des Trophées d'or des entreprises alsaciennes, le 2 décembre 2019, a permis de distinguer « Moi, moche et bon », lauréat du trophée de la responsabilité environnementale de l'entreprise.

Thomas Garcia, Séverin Meuillet et Jérémy Flippes (au Gymnase de 2006 à 2010, entre les deux présidents des départements alsaciens sur la photo), partagent le goût du commerce, du handball et le sens d'une économie responsable. Mais pas que ….. !

Pour lutter contre le gaspillage alimentaire, les créateurs de cette start-up ont décidé en 2015 de démarcher des producteurs pour leur racheter les pommes qu’ils ne peuvent pas vendre à la grande distribution, pour des raisons esthétiques et de calibrage. 

" MOI MOCHE ET BON AUJOURD'HUI "
Ce sont des fruits jugés trop moches pour être croqués, mais maintenant trop bons à boire. Des fruits cueillis à maturité dans les vergers alsaciens et pressés chez l’artisan du coin. Des fruits issus uniquement de variétés de qualité de pommes de table d’Alsace, de fraises et de carottes d’Alsace et d’agrumes de Corse.
C’est le pouvoir de reverser au minimum un euro* à nos producteurs et artisans par bouteille. C’est valoriser des fruits initialement destinés à être laissés sur les arbres ou jetés sans plus d’égard pour leurs valeurs nutritionnelles et leur goût savoureux. C’est agir favorablement contre le gaspillage alimentaire. C’est consommer des purs jus artisanaux et naturels 100 % d’origine française.


Présent en grande distribution dans une trentaine de magasins en Alsace, le jus de pomme de Moi moche et bon a débarqué dans tous les magasins Carrefour d’Ile-de-France et du Grand Est – soit 1 200 magasins - sous la marque « Tous antigaspi ».
L’an dernier l’entreprise achetait ses pommes auprès d’un producteur bas-rhinois qui comptabilisait 250 tonnes d’écarts de tri sur le millier de tonnes qu’il vend tous les ans à la grande distribution. « Avec ces 250 tonnes, nous produisons 200.000 litres de jus de pomme » dit Thomas.

Les pommes sont ensuite pressées par un artisan près de Saverne (Bas-Rhin) qui possède une capacité de production de 12.000 bouteilles par jour.
Leur stand au salon de l'Agriculture de Paris


Vous voulez en savoir plus sur ce projet dynamique : https://moimocheetbon.fr/





mardi 3 décembre 2019

Le Gymnase, 475 ans de pédagogie au cœur de Strasbourg


Inscrit dans l’histoire éducative de la ville de Strasbourg depuis le XVIème siècle, berceau de l’université, l’école devenue Gymnase avec Jean Sturm, poursuit sa mission éducative depuis plus de 475 ans, sous la tutelle du Chapitre de la Fondation Saint Thomas, administratrice de la Fondation Haute Ecole.

 Lucie Berger, développe depuis 143 ans l’expression éducative des Sœurs Diaconesses de Strasbourg.

Ces deux structures protestantes se sont efforcées, à travers les vicissitudes de l’histoire, de s’adapter à chaque époque et se sont unies pour répondre au mieux aux projets de leurs fondateurs : que transmettre, comment transmettre, comment participer à la construction humaine de la Cité ?

Voici le récit croisé de leur évolution,  le fil d’une histoire tendue entre deux révolutions technologiques majeures qui ont bouleversé, qui bouleversent le monde de l’éducation : du développement de l’imprimerie au XVIe siècle aux technologies de l’information et de la communication du XXIème siècle.

Le récit d’une aventure humaine dense, marquée par l’Histoire, grande et petite, celui des périodes dynamiques mais aussi des difficultés, un récit illustré par une importante iconographie souvent inédite, puisée tant dans les archives de la BNU que dans des collections privées et celles des deux écoles.

Une liste d’anciens élèves célèbres, des chronologies croisées complètent l’ouvrage dans lequel Marc Lienhard et Claude Keiflin ont relevé le défi de retracer une aussi longue histoire en quelques pages et aboutir à ce livre unique réalisé par les Editions du Signe.

Le livre est disponible (25€) à l’accueil du Gymnase Jean Sturm, 8 place des Etudiants à Strasbourg.



Jean Sturm


 Jean Sturm a donné son nom à notre établissement qu’il a fondé en 1538 dans les murs d’un ancien couvent de dominicains (à la place du Gymnase Jean Sturm actuel)

Jean Sturm est donc un homme du 16è siècle.

Mais entre ce siècle et le nôtre on peut observer de troublantes analogies : la découverte du nouveau monde entraîne une forme de mondialisation, à la fois exaltante et inquiétante ; les fanatismes religieux conduisent à des guerres au moins aussi cruelles qu’entre sunnites et chiites aujourd’hui; enfin les découvertes techniques comme l’imprimerie bouleversent comme internet le rapport au savoir

Un monde aussi incertain a besoin de repères. Un de ces repères fut l’humanisme. Jean Sturm fut un grand humaniste c’est-à-dire un homme qui cherche dans le passé , dans l’antiquité grecque et romaine plus particulièrement, des modèles de conduite et de sagesse pour construire un homme idéal, pour humaniser, si possible, l’homme au service de la cité.

A notre tour il est possible de nous tourner vers le passé pour construire l’avenir et considérer Jean Sturm comme un modèle, un exemple,  pour au moins trois raisons.
Ce fut d’abord un européen avant la lettre : né en Allemagne, formé à Louvain, professeur à Paris au Collège royal, appelé à Strasbourg à l’âge de 31 ans par le maire pour fonder une nouvelle école ; or ce cosmopolite fut aussi enraciné dans sa foi protestante contre les abus et les superstitions, dans sa culture, ses convictions, ses valeurs.
Ce fut ensuite un pacifiste comme Erasme : il chercha à réconcilier les deux partis catholiques et protestants ; mais quand ce ne fut plus possible il s’engagea aux côtés des protestants  en payant de sa personne : tout en exerçant son travail de directeur il accepta des missions diplomatiques périlleuses pour défendre la liberté de villes protestantes menacées par Charles Quint ; il paya aussi de sa bourse puisqu’il  donna de fortes sommes d’argent aux protestants français persécutés,  sommes qu’il ne récupéra jamais,  si bien qu’il mourut ruiné.
 Troisième raison : il sut concilier la parole et l’écriture. Il révolutionna l’enseignement , au point que le gymnase fut admiré et imité partout en Europe ; il eut la conviction que pour bien penser , pour bien maîtriser ses connaissances au service de la cité, il fallait bien parler ; l’enseignement était donc fondé sur l’art de l’éloquence et sur les langues (avant le droit et la médecine) et il imagina les vertus du théâtre scolaire.
Mais il sut aussi comprendre les vertus de l’imprimerie pour diffuser le savoir, devint éditeur (de textes comme Homère pour ses étudiants) et installa dans la chapelle du couvent une bibliothèque qui se développa au cours des siècles et devint la grande bibliothèque de Strasbourg avant de brûler en 1870 (remplacée par l’église du Temple Neuf).

Jean Sturm est donc un exemple mais peut-être surtout parce qu’il fut un homme juste, droit, bon et libre, ce que je nous souhaite d’être ou de toujours chercher à devenir.

                                    Marc Peter, professeur de Lettres - 2013