dimanche 23 décembre 2018

Nicolas (Bac 1995) et le thé des Talibans



Dans Kaboul Disco , son savoureux diptyque consacré à son expérience de dessinateur en Afghanistan, Nicolas Wild racontait « comment je n’ai pas été pris en otage par les talibans ». Aujourd’hui, dans Kaboul Requiem , il livre le récit du journaliste britannique Sean Langan détenu par un groupe d’Al-Qaida. L’aventure frappée au sceau de la réalité.

Il s’était jeté dans la gueule du loup. Journaliste pour la chaîne britannique Channel 4, Sean Langan était allé chercher le scoop, en mars 2008, dans une zone tribale au nord du Pakistan. Son objectif : rencontrer le chef d’un groupe de talibans inféodés à Al-Qaida.
Mais le reportage allait rapidement virer au cauchemar : pour les talibans, Sean Langan était une proie de choix. Car depuis qu’il avait couvert en exclusivité pour la presse occidentale l’intervention de l’armée soviétique à Vilnius, le 7 janvier 1991, dans une Lituanie lancée sur la voix de l’indépendance, le journaliste était devenu une figure de la presse britannique.
Le groupe du mollah Siraj Haqqani, planqué dans les montagnes à cheval entre l’Afghanistan et le Pakistan, ne pouvait rêver meilleure occasion d’attirer l’attention sur lui. Après trois mois de détention, d’incertitude sur son sort, Sean Langan sera finalement relâché.

La prise d’otage en genre littéraire
Une trajectoire qui ne pouvait laisser indifférent Nicolas Wild. On connaît l’intérêt qu’il nourrit pour l’Afghanistan depuis qu’il y a séjourné de 2005 à 2007. Travaillant pour une agence de communication, il y avait notamment mis en BD la nouvelle constitution du pays.
De cette expérience, l’auteur alsacien, formé à l’atelier d’illustration des Arts Déco, avait livré un roman graphique en deux tomes, Kaboul Disco (chez La Boîte à bulles), beau succès de librairie, totalement justifié tant le regard de Nicolas Wild se révélait à la fois acéré sur le quotidien de l’Afghanistan, que décalé, porté par une distance ironique qui apportait toute sa saveur à son récit. Le sous-titre en témoignait : Comment je ne me suis pas fait kidnapper en Afghanistan.
  
« L’enlèvement d’Occidentaux était devenu une spécificité nationale. Et une fois libérés, les ex-otages s’empressaient de publier leur récit. Cela devenait un genre littéraire en soi… », s’amuse-t-il. Échappant à ce sort redoutable, Nicolas Wild effectuera un second séjour, en 2009, à Kaboul : « Très court. Juste deux semaines pour y présenter Kaboul Disco. J’avais une centaine d’exemplaires. Tout était parti en une soirée ! Mais sur place, la situation avait bien changé. Cela s’était considérablement dégradé. Il y avait des barrages partout, avec des mercenaires surarmés. Les restaus sympas avaient fermé… ».

À l’entendre, le Kaboul de 2005/2007 relevait du havre de paix, d’une terre où régnaient le calme et la félicité. Rires de Nicolas Wild. Qui convient : « Oui, c’était déjà assez risqué à ce moment-là. »
Depuis son dernier séjour à Kaboul, ce que Nicolas Wild appelle sa « nostalgie afghane » s’est passablement dissipée et il ne pense plus jamais retourner en Afghanistan. Mais il ne pouvait cependant demeurer indifférent à la mésaventure de Sean Langan qu’il a eu l’occasion de croiser à deux reprises. « La première fois, c’était en 2012, lors d’un week-end d’anciens d’Afghanistan, à la campagne. Je l’ai revu ensuite à Paris. Il m’avait raconté son histoire d’enlèvement. Comme de mon côté j’avais évoqué comment je ne m’étais pas fait kidnapper, j’ai trouvé que c’était une bonne idée de passer à quelqu’un qui n’avait pas eu ma chance », explique-t-il.

C’est donc un roman graphique à deux signatures qu’il nous livre dans Kaboul Requiem , joliment sous-titré Un thé avec les talibans. C’est que durant ses trois mois de détention, Sean Langan en a bu des thés, sous le regard vigilant de gardiens armés jusqu’aux dents. Ce nouvel opus renforce encore l’image que s’est peu à peu forgée Nicolas Wild de spécialiste de cette région du globe à l’actualité si rude : « C’est vrai qu’il est difficile pour moi de fermer la porte de l’Afghanistan. D’ailleurs, maintenant, je n’arrête pas de croiser des Afghans réfugiés en France qui me proposent de raconter leur histoire ».
Comme pour en prendre le contre-pied, ses trois prochains livres n’auront rien à voir avec ce pays. Mais il s’agira toujours, pour cet auteur qui pratique la BD à la façon d’un reportage, des récits inspirés de son expérience de la réalité.
Et Nicolas Wild de résumer avec une dernière pirouette son rapport à la bande dessinée : « Il y a tellement à faire avec la réalité. Pas besoin d’avoir d’imagination ! »

Kaboul Requiem. Un thé avec les Talibans , chez La Boîte à bulles, 157 pages, 19 €.

DNA 16 décembre 2018

samedi 24 novembre 2018

Sortie culturelle des Alumni, avec travaux pratiques chocolatés

Bockel et la chocolaterie ... 

Ne vous demandez plus si les Alumni sont gourmands : c’est un oui définitif. Quand on les invite à visiter la chocolaterie Jacques Bockel à Monswiller, ils débarquent en nombre (une trentaine), et certains posent même un jour de congé pour l’occasion !
  
Les pires sont ceux qui ont traîné une bonne demi-heure à la fin de la visite dans le magasin attenant, hésitant entre talons-aiguilles chocolatés à croquer et tablettes kamasutra à euh... étudier (inutile de nier). Bien sûr, ils vous diront que s’ils s’attardaient, c’était pour profiter encore un peu de la vue directe sur les ateliers, mais ne soyez pas dupes ! Leurs paniers étaient remplis à ras bord. Certains arriveront d’ailleurs en retard à la réunion du comité de Gymnase Alumni le soir même, prétextant des difficultés liées au trafic. Ba-li-ver-nes !

Et pourtant, à dire vrai, cela commençait mal. Dans le hall façon plantation de cacaoyers, on nous a annoncé que le patron en personne, Jacques Bockel, allait s’occuper de nous.

L’idée de devoir se tenir d’autant plus à carreau (de chocolat) a, l’espace d’un instant, cristallisé les anciens élèves studieux mais facétieux que nous sommes restés. On se voyait déjà, au moindre faux pas, transformés un à un en « bonbons de chocolat » (le terme officiel pour pralinés), comme dans l’usine de « L’Aile ou la Cuisse », vous savez, celle qui concocte des poulets en plastique.

Mais point d’usine ici, ni de « semi-industriel ». Un éminent Alumni n’avait d’ailleurs pas fini d’articuler ce terme au détour d’une pourtant intéressante question (sur le marché du chocolat) que le maître des lieux, artisan de son état, était déjà prêt à en découdre.

Mais si Jacques Bockel parle fort (et l’on dira même plus : rares sont ceux dont la voix porte autant) voire impressionne du haut de ses cent kilos, c’est en réalité un généreux transmetteur de passion, un autodidacte qui dit ce qu’il sait et qui reconnaît quand il ne sait pas, un grand cœur à l’humour un peu potache sous ses airs de patron coriace à qui on ne la fait pas (« c’est quoi ce travail de bourrin ! »), entre deux expressions en alsacien pour bien ancrer la boutique. Ses salariés le lui rendent bien : quasiment zéro turnover. Bockel, c’est aussi et surtout un communicant hors pair.

Pour s’en convaincre, il suffit de s’intéresser à l’originalité de son offre de produits et de leurs packagings (connaissiez-vous le « Calendrier de l’Avent et de l’après » à 31 cases ?), ainsi qu’à l’architecture « façon tablette » de sa chocolaterie flambant neuve. L’ancienne est partie en fumée en 2014 : « On dit que c’est un incendie criminel, mais c’est surtout de la bêtise : deux jeunes qui ne savaient pas quoi faire la nuit et qui ont brûlé des papiers dans une poubelle. » Même pas rancunier !

La chocolaterie, donc. Une grande pièce, des machines un peu partout, de toutes tailles, de toutes formes. L’odeur, entêtante : le cacao, ici, on le sniffe. Des chocolatiers s’affairent.

Les unes peignent sur chaque moule les habits des pères Noël (exclusivement aux colorants naturels), d’autres façonnent les châtaignes. Tiens, savez-vous comment on reproduit en chocolat les piquants des châtaignes ? Non ? Nous, si ! Mais chut, c’est un secret.
Ici, certains confectionnent des pralinés avec le décor qui va bien ; là, on pilote une machine ultramoderne qui produit en une seule passe à la fois l’intérieur et l’extérieur des fameux Männele en chocolat. Inutile de préciser que l’on déguste un peu tout ce que l’on voit, le chef a le cœur sur la main, on l’a dit.

Plus loin, l’atelier moulages avec ses fontaines de chocolat (le top, ce sont les moules aimantés que l’on assemble sans pinces), et voici que chaque Alumni est amené à garnir de fruits secs et autres friandises une tablette 63 %. Passons sur ceux qui ne décorent pas, qui en mettent trop, qui oublient d’ajouter leur nom : de vrais gamins ces Alumni, on se croirait à l’école !

D’ailleurs, les ex-élèves ne se privent pas de quémander les trucs et astuces du maître, qui ne manque pas de répondant : « Eh oui ma brave dame, votre ganache elle ne brille pas parce qu’il faut mettre la crème chaude dans le chocolat froid, pas l’inverse. »
« Pour vos orangettes, il faut du chocolat tempéré [il trace de la main la courbe de température] : un tiers de chocolat râpé dans le chocolat fondu, et c’est réglé ! » Sans oublier le « Comment, vous n’avez jamais nappé de chocolat un gâteau ?! ». Bah non m’sieur, on avait la pâtisserie Christian juste en face.


Au fil de la visite, il nous prend sous son aile et on le lui rend bien : l’alchimie opère, et hop, on mérite de faire un petit détour imprévu du côté de l’atelier de torréfaction. Depuis deux mois, Jacques Bockel ne se contente plus d’acheter du chocolat de couverture prêt à l’emploi, mais torréfie, meule, et surtout conche lui-même ses fèves de cacao.
On savait déjà tout sur les cabosses, le décabossage, le mucilage, la fermentation des fèves et leur séchage, grâce à un documentaire de vingt minutes en début de visite (pas sur une petite télé de salon, mais sur écrans géants à 180 degrés... c’est un communicant on vous dit !).

Et maintenant, dans une pièce couleur café, bronze et brique rouge à la lumière tamisée, nous découvrons les secrets de la torréfaction. Mais nous garderons ça pour nous, puisque vous pourrez vous y initier lors d’une des soirées dînatoires ambiance jazzy bientôt au programme.

Encore un petit creux ? Allons voir du côté du réacteur nucléaire de Bockel, l’atelier dans l’atelier, celui qui fabrique le copié mais jamais égalé... Nut’Alsace. Un genre de Nutella qui carbure au colza (oui mon bon monsieur, l’huile de noisette ne suffit pas).

Là, nous sommes accueillis par un expert, « Monsieur Nut’Alsace » en personne. Mais oui, souriez, souriez : 800 kilos au démarrage et 60 tonnes maintenant ! Noisettes du Piémont ou noisettes françaises, goût corsé, au maltitol ou avec du lait : c’est l’embarras du choix.

Oui c’est gras, oui c’est sucré, oui ça stimule le circuit neuronal de la récompense qui fait que l’on finit le pot juste après l’avoir commencé, on sait.
Mais on va pas en faire une tablette !

Récit d’Antonio Lagala
12/11/2018.

La violette pour Jacques (Bac 1966)


Jacques Flurer dans l'Ordre des Palmes Académiques

Le Gymnase Sturm a servi de cadre à la remise de la médaille de chevalier dans l’ordre des Palmes académiques à Jacques Flurer, président de l’association des anciens élèves et amis de cet établissement.

Ce moment solennel et convivial a réuni autour du récipiendaire de nombreuses personnalités et amis.

Jean-Pierre Perrin, secrétaire des Alumni du Gymnase, lui-même officier des Palmes académiques, après avoir excusé l’absence de Guy Mielcareck, proviseur, a ouvert la cérémonie en rappelant les nombreux engagements de Jacques Flurer : à la Fondation du Sonnenhof, au Rotary du Kronthal, au Cercle de l’Ill, au comité des Alumni du Gymnase, sans oublier la société du jeu de quilles des Contades : « C’est un homme d’engagement et de conviction au service des autres, et plus particulièrement impliqué au service des élèves actuels et anciens du Gymnase, qui veille au lien intergénérationnel. »

Au nom du comité des Alumni, il l’a remercié chaleureusement pour toutes ses actions en y associant son épouse et sa famille.


Martin Bruder, président de l’Amopa (*) du Bas-Rhin, commandeur des Palmes académiques, a rappelé ensuite l’origine de cette distinction prestigieuse napoléonienne qui « n’est pas une récompense, mais une reconnaissance de la République pour les services rendus à la jeunesse ». 
Tout en citant quelques titulaires de cette distinction (René Cassin, Marcel Pagnol, Charles Trenet), il a souligné les mérites incontestés du récipiendaire, qui s’inscrivent de manière éclatante dans la devise « partager et servir ».

Avant de lui remettre, au nom du ministre de l’Éducation nationale, la médaille, Martin Bruder a précisé que cette distinction était communément appelée « la violette » en raison de sa couleur.
Dans son discours de remerciements, Jacques Flurer a égrainé quelques souvenirs, se félicitant des nombreuses rencontres qui lui ont permis de mener à bien ses activités, et s’est engagé à poursuivre ses actions avec enthousiasme et ténacité.

DNA 31/10/2018

(*) Association des Membres de l'Ordre des Palmes Académiques

dimanche 11 novembre 2018

Amycie de Crevoisier (Bac 2011) pour une solidarité concrète

Amycie de Crevoisie nous invite à participer à une conférence organisée par l'association ACAY avec laquelle elle est partie en volontariat l'an dernier après sa sortie de l’Edhec (Lille). 

Ce sera le 19 novembre à 20h30 au 4 rue Gloxin à Strasbourg.

Après 20 ans de mission auprès des jeunes défavorisés à Manille et maintenant également à Marseille, Soeur Sophie de Jésus vient partager avec nous son expérience d’une compassion qui défie le chaos des bidonvilles et des gangs, où les jeunes sont pris dans l’engrenage de la drogue et de la violence.

ACAY aide des jeunes en difficulté de 15 à 23 ans à se réinsérer après un lourd passé :
- A Manille, l'Ecole de Vie accueille des jeunes filles victimes de violences, d'abus et d'abandon, afin de les aider à se reconstruire et à se réinsérer de manière autonome dans la société.
- A Manille et Marseille, le programme Seconde Chance aide des jeunes garçons à se réinsérer après la prison.

La fondatrice d'ACAY sera présente lors de la conférence et donnera son témoignage, ainsi que Laurent qui a passé 15 ans à accompagner des jeunes dans les prisons pour mineurs aux Philippines et à Marseille. Voilà le lien de l'événement sur Facebook : https://www.facebook.com/events/343978802836834/

Pour plus d'informations sur l'association, voici une vidéo :
 https://www.youtube.com/watch?v=4WmSRjUgMBs&t=2s
 et le site internet d'ACAY : https://acaymission.com/fr/home-fr/

N'hésitez pas à en parler autour de vous !

samedi 10 novembre 2018

Benjamin Malatrait (Bac 2010): une start-up pour révolutionner le cuir


Cuir Marin de France est une start-up qui développe et commercialise des cuirs marins. Il s'agit de la première tannerie en création depuis plus de 35 ans en France. 
Concentré sur la valorisation de coproduits de peaux de poissons de la filière agroalimentaire et de la restauration et la mise en place d'un procédé de tannage utilisant des tanins végétaux, Cuir Marin de France porte l'ambition d'une mode Made in France et plus respectueuse de l'environnement à destination des maisons du luxe.

Benjamin Malatrait lance une campagne de financement participatif en royalties (sous la forme d'investissement): https://www.wedogood.co/cuir-marin-de-france/

La récolte a atteint 44% de l’objectif de 75 000 euros en seulement 7 jours, la campagne clôture le 1er décembre.


Aujourd’hui l'utilisation de cuir est controversée pour des raisons environnementales et étique. En effet, 90% des cuirs à travers le monde sont aujourd’hui produits à l'aide de procédé nécessitant l'utilisation de composés chromés.

L’innovation, soutenue notamment par BPI France dans le cadre de la Bourse French Tech et lauréat du concours Pépite régional et national est double. 
Une innovation d’usage en mettant en avant un matériaux luxueux ainsi qu'une innovation de procédé en développant pour la première fois en France un procédé de tannage industriel de tannage de peaux de poisson avec des tanins naturels.

"Aujourd'hui nous faisons attention à ce que nous mangeons, demain nous ferons attention à ce que nous porterons."

Noa Roquet (Bac 2018) dépoussière en vidéo la Psychanalyse de l'Alsace de son arrière-grand-père


Arrière-petite-fille de Frédéric Hoffet, Noa Roquet se passionne « depuis toujours » pour le cinéma, avec une prédilection pour le documentaire. Elle aime montrer comment l’humain réagit face à l’adversité, l’émotion en prime.

Elle a entamé en septembre 2018 une licence de cinéma à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Une suite logique pour la jeune femme de 18 ans qui s’est toujours passionnée pour l’image. Elle a passé un bac littéraire avec spécialité cinéma au lycée Jean-Sturm de Strasbourg et « rêverait de réaliser des documentaires ».
Dans Kthimi , court-métrage documentaire réalisé au Gymnase, elle suit une mère et sa fille, réfugiées kosovares, qui retournent dans leur pays d’origine après huit ans d’absence. Elle a également réalisé un court-métrage à l’Etablissement public de santé Alsace Nord (EPSAN) de Brumath, qui a remporté un prix dans un festival spécialisé de Bruxelles.

« Le documentaire offre une façon particulière de regarder le monde et d’aller vers les autres », explique Noa Roquet qui aime montrer comment l’humain réagit face à l’adversité, l’émotion en prime.

Noa Roquet dépoussière en vidéo la Psychanalyse de l’Alsace, alsatique emblématique de son arrière-grand-père Frédéric Hoffet. Le regard que ces douze personnalités posent sur l’Alsace d’aujourd’hui transcende le complexe de l’enfant adoptif.

Chaque réédition de la Psychanalyse de l’Alsace révèle l’avancée de la cure. Celle de 1973, parue dans la collection Alsatia Poche, s’ouvre sur un avant-propos de Germain Muller et une gravure de Théophile Schuler, D’r Hans im Schnockeloch. L’édition de 1994, chez Alsatia toujours, est enrichie d’inédits de l’auteur et complétée par Jean-Louis Hoffet, le fils, qui fut pasteur, conseiller régional et conseiller du président Adrien Zeller.
La couverture de l’édition de 2008, aux Éditions Coprur, montre des cigognes miniatures plantées dans des parts de Forêt-Noire. La préface est signée par l’écrivain Martin Graff et la postface par Adrien Zeller.

Prolongation du livre en douze vidéos
Une autruche remplace la cigogne dans la dernière réédition parue ces jours-ci avec des dessins de Tomi Ungerer. Son trait souligne la dualité culturelle d’Alsaciens pris dans un étau, la tête dans le sable ou englués dans une coquille d’escargot. Une version espiègle de la gravure de Schuler, en somme.
Mais l’illustration ne s’arrête pas là. Le livre se prolonge cette fois-ci par douze vidéos très courtes dans lesquelles des personnalités alsaciennes expriment ce qu’est l’Alsace pour elles aujourd’hui, 67 ans après la première publication du texte de Hoffet. Elles sont réalisées par Noa Roquet, arrière-petite-fille de Frédéric et petite-fille de Jean-Louis, étudiante en cinéma à la Sorbonne . Les pixels détrônent l’édition brochée et jaunie de chez Flammarion.

Les registres sont variés et les thématiques complémentaires, mais des invariants traversent les témoignages comme la langue maternelle, l’Histoire, l’incarnation de l’Europe, l’enracinement et l’ouverture.
Pour visionner les vidéos, survolez la mosaïque et cliquez sur les boutons de chaque portrait. Chacune des 12 vidéos fait 1mn30. La question : "Et aujourd'hui, qu'est-ce que pour vous l'Alsace ?"

Pour Kinan Alzouhir, chanteur d’opéra, réfugié syrien en Alsace depuis trois ans, Strasbourg partage des « choses particulières » avec Damas. Cyrille Schott, ancien préfet du Haut-Rhin, voit sa « petite patrie natale » comme « la terre du miracle de la paix européen ». Odile Uhlrich-Mallet, adjointe au maire de Colmar, décrit le comportement de l’enfant adoptif que Frédéric Hoffet développe dans son ouvrage en rappelant « le balancement » endémique entre « révolte » et « gage de patriotisme ».
Jean Rottner, président du conseil régional Grand Est, invite l’Alsace « à s’ouvrir », « à conquérir le monde » et « à n’avoir aucune peur ». Brigitte Klinkert, présidente du conseil départemental du Haut-Rhin, relève quant à elle que « le bassin de vie de l’Alsace est le bassin rhénan ». Catherine Trautmann, ancienne maire de Strasbourg et ministre de la Culture, évoque « la nécessité » pour l’Alsace « de peser » face au Bade-Wurtemberg, au Luxembourg, à la Bavière et à la Suisse.

« Une région formidable»
Opposant au Grand Est, Pierre Kretz observe pour sa part « une région qui se défend et prend conscience d’elle-même de manière différente et décomplexée ». « Une région formidable parce qu’il y a un renouveau démocratique et une vigilance citoyenne », estime l’écrivain et ancien avocatJean-Marie Woehrling, président du Centre culturel alsacien et ancien président du tribunal administratif, souligne « la vocation biculturelle, bilingue et transfrontalière » de l’Alsace en plein débat sur son avenir institutionnel.

Arsène Wenger, entraîneur d’Arsenal pendant 20 ans, parle de sa « fierté » de se sentir européen qui lui a donné « envie de fraternité et de voyages ». Mais aussi du « club de foot dans tous les villages », « du Racing et de la Meinau », et « de l’absence de l’Alsace à Noël » qu'il ressentait quand il vivait à l’étranger.

Pour Frédérique Neau-Dufour, directrice du Centre européen du résistant déporté basé au Struthof, l’Alsace est « le point d’interrogation de la France » qui « renvoie le pays à tous ses fantasmes sur le plan historique et à tous ses marqueurs identitaires ». L’historienne cite la langue, la centralisation et la religion.

«On a une identité et on a envie de la partager »
C’est une part plus intime que nous dévoile Clémence Zeller, architecte et fille d’Adrien Zeller, en parlant de la transmission d’une culture à ses enfants en dehors de la terre d’origine. « Il suffit de déménager pour se rendre compte qu’on a une identité et qu’on a envie de la partager », remarque l’Alsacienne de Paris.

« L’alsacien est ma langue maternelle qui a ceci de singulier qu’il est extrêmement accueillant, et qui fait que celui qui le parle devient lui aussi peu à peu accueillant et n’aime pas trop les frontières », explique Michel Wackenheim, archiprêtre de la cathédrale de Strasbourg, qui se sent « avant tout Européen ».

«Le sens inné de l’étranger»
Cette dimension ressurgit quand on interroge Noa Roquet sur l’actualité du texte de son arrière-grand-père. « L’Alsace est un peuple qui peut comprendre la douleur de l’exil avec un regard du passé. C’est une richesse pour entendre celles et ceux qui arrivent aujourd’hui chez nous », souligne la jeune femme.
À la fin du livre, son aïeul note que « l’horizon de l’Alsacien dépasse celui des deux nations dont il est l’héritier. Il a une ouverture d’esprit qui lui permet de pénétrer les civilisations les plus variées. Il a le sens inné de l’étranger. » Frédéric Hoffet l’écrit, Noa Roquet le révèle.

DNA 21 octobre 2018



La genèse du Gymnase sous la plume de Louis Nore

Louis Nore , qui a dirigé les journaux de la Ville et de l’Eurométropole de Strasbourg pendant vingt-quatre ans, a publié le 4 octobre dernier un récit de 130 pages autour de la création du plus ancien lycée d’Alsace, le Gymnase par Jean Sturm, il y a près de 500 ans, et des années qui ont suivi.

Au passage, il livre de nombreux portraits en encadrés pour redécouvrir de grandes personnalités de la cité, comme Jacques Sturm, le « faux jumeau », ainsi que le nomme l’historien Georges Bischoff dans sa préface. Martin Bucer, Jacques Wimpfeling, Sébastien Brant, ou les moins connus Philipp Melanchthon ou – une femme ! – Catherine Schütz font aussi partie de la galerie.

« Pour moi, un gymnase, c’est un endroit où on joue au basket », plaisante l’auteur originaire de Toulon, se remémorant son arrivée à Strasbourg en 1990. Le vocable appliqué à un établissement a piqué sa curiosité et c’est avec plaisir qu’il s’est plongé dans l’époque de Jean et Jacques Sturm, qui n’avaient pas de lien de parenté, mais des idées communes sur l’éducation.

« Ce n’est pas une œuvre d’historien, même si j’ai fait des études d’histoire », explique le journaliste retraité. J’ai voulu raconter une belle histoire, une épopée. » Le décor : « Cette ville de Strasbourg qui venait d’aller dans la Réforme sans violence, paisiblement et naturellement. »

Les dernières pages du livre passent en accéléré sur la suite de l’histoire, évoquant Schoepflin et Oberlin, pour aller jusqu’à aujourd’hui, avec une liste d’élèves contemporains qui comptent dans la cité.
1538-2018 La Belle jeunesse du Gymnase Jean-Sturm , de Louis Nore, Bastian éditions, 18 €.
Samedi 10 novembre, de 9 h 30 à 12 h 30, dédicace au Super U d’Eschau. De 15 h à 18 h, à la Librairie Broglie.
Mercredi 21 novembre, de 17 h à 19 h, dédicace à la librairie Oberlin.
Samedi 24 et dimanche 25 novembre, dédicace au Festival du livre de Colmar sur le stand Bastian éditions.

DNA 21 octobre 2018

Hélène Munoz (Bac 2005): les tapas sans mémé ni orties

Ambiance latino-arty à la Krutenau

Elle est Française, née d’une mère péruvienne et d’un père chilien. Hélène Muñoz a repris cet été le restaurant Mémé dans les orties, rue Munch, pour en faire un bar à tapas « arty ». Bienvenue chez Quino !

Elle l’a fait ! Hélène Muñoz a beau n’avoir que 31 ans, elle vient d’entrer dans le cercle très restreint de ceux qui ont « repris » une affaire à Franck Meunier (lequel reste néanmoins propriétaire des murs). Exit, donc, Mémé dans les orties, place au Quino ! « Comme quinoa ? », s’interroge un collègue sceptique, craignant déjà l’arrivée d’un nouveau temple du « sans-gluten-100 %-végétal » ? Que nenni, même si l’endroit s’affiche « vegan friendly ». Aucun lien non plus avec le dessinateur de Mafalda. « Quino, c’était le surnom de mon papa, le premier enfant jamais né – par les hasards de la vie et d’un père jeune officier de marine – sur une petite île au Sud du Chili nommée Quiriquina », explique Hélène Muñoz. « Comme la coutume chilienne veut qu’on donne un surnom aux nouveaux nés et que Quiriquina sonnait trop féminin, ça s’est transformé en Quino ! » Depuis, l’inspirant papa est décédé et Hélène a voulu lui rendre hommage.

Artistes bienvenus

D’autant qu’en ouvrant ce bar à tapas, c’est aussi de ses racines que se rapproche la jeune femme, fille d’un père chilien et d’une mère péruvienne. « À la base, j’ai un DUT techniques de commercialisation », explique celle qui, la trentaine approchant, s’est réorientée vers un BTS hôtellerie-restauration à Illkirch. Elle a cumulé les expériences, fait l’ouverture du O’Brian, travaillé chez Tapas Toro, à la Brasserie Michel Debus, chez Capricciosa en tant que chef de cuisine… Jusqu’à ce qu’inspirée par un long voyage sac au dos en Amérique Latine, il y a deux ans, cette passionnée de cuisine se décide à voler de ses propres ailes. Panama, Costa Rica, Colombie, Pérou, Argentine, Chili… « J’ai toujours cuisiné des spécialités latinos, mais là, j’ai réalisé à quel point cette cuisine était riche et à quel point j’avais envie de la faire découvrir ! »

Chez Quino, chaque semaine voit débarquer son lot de nouveautés. Ceviche, empanadas, quesadillas, chile en nogada (un piment farci)… « Des plats toujours faits maison par deux femmes en cuisine, Maria José, qui est Mexicaine, et Alizée, qui est Française », insiste Hélène Muñoz. Cette semaine, c’est le Salvador et sa spécialité nationale – les pupusas, des galettes de maïs fourrées déclinées en trois versions, dont une végétarienne – qui ont les honneurs de la formule du midi (proposée à 9,90 €, café compris). Guacamole maison (Mexique), causa rellena (une purée citronnée et légèrement pimentée originaire du Pérou), empanadas de pino (made in Chile), ou « completo » – un hot-dog au goût d’enfance composé d’une saucisse de volaille, de choucroute et de purée d’avocat : « Frias » (froids) ou « calientes » (chauds), les tapas agrémentent aussi les soirées, Au même titre que les Pisco sour, Mezcal, tequilas, vins et autres rhums d’outre-Atlantique à consommer avec modération.

Pour faire voyager plus encore des clients qu’elle chouchoute, Hélène Muñoz a aussi voulu personnaliser le lieu. C’est passé par un concours « pimp my chair » – où elle a demandé à 15 artistes de peindre autant de chaises – et une superbe fresque de l’artiste mexicaine Juana Sabina Ortega, « qui est venue la réaliser sur place, durant une semaine, cet été », s’enthousiasme Hélène Muñoz. La jeune femme ayant le souci du détail, même les toilettes ont été customisées, façon autel-religieux-kitsch-latino-américain, par l’artiste Clémentine Lataillade, et le mur du fond devrait bientôt l’être par Unikko Tattoo.

Les fêtes nationales et autres « dias de los muertos » sont – ou seront – aussi célébrés ici, ce qui vaut déjà à la jeune femme la reconnaissance de la communauté latino du secteur. De quoi instiller un peu de couleur et de dépaysement dans la  mauvaise saison qui s’annonce !
DNA 02/10/2018

Margaux Tahar (bac 2015) renversante à 3 000 pieds


La voltige en championne

Margaux Tahar, championne de France de voltige aérienne biplace en catégorie Espoir, a offert un spectacle renversant.

Son avion a enchaîné les acrobaties, la semaine dernière à Châteauroux, aux championnats de France de voltige aérienne biplace. Effectuant des boucles (les fameux « loopings »), des vols sur le dos et d’autres figures renversantes… Margaux Tahar concourait dans la catégorie Espoir où elle a terminé première.
Déjà pilote de haut niveau à 20 ans la jeune femme originaire de Mittelhausbergen en a mis plein la vue et a réalisé des figures étonnantes. Au point de monter sur le podium.

Un sans-faute
« Une sacrée performance pour une première participation à une compétition », la félicite son entraîneur, Jean-Emmanuel Antal, chef pilote à Alsace Voltige, l’association basée à Haguenau où elle a fait tout son apprentissage de la voltige aérienne depuis ses 18 ans.
« Margaux a prouvé qu’à 20 ans, on peut gagner une compétition, explique l’ancien entraîneur de l’équipe de France en 2015 et sportif de haut niveau. Elle est aussi la première Alsacienne à obtenir ce titre de championne de France. »

Lâchée en solo à l’âge de 15 ans
Figure montante de la voltige aérienne, Margaux s’épanouit dans ce sport extrême. Le déclic ? Enfant, le passage de la Patrouille de France au-dessus de sa tête à Marseille la convainc : « Je veux en faire mon métier », décrète la petite fille. Qui volera pour la première fois à l’âge de 11 ans dans un petit avion de tourisme piloté par le fils de sa prof de sport.

Discipline de fer et nerfs d’acier
Membre du Cercle Aéronautique Strasbourg Entzheim, elle pilote seule le jour de ses 15 ans. C’est ici qu’elle obtient son diplôme et s’astreint à des entraînements, tous les week-ends sans exception. Ce qui nécessite une discipline de fer et des nerfs d’acier.

Ses parents ne sont jamais trop loin lorsqu’elle s’entraîne à Haguenau. Maman veille au bien-être de la famille, papa a fait le grand saut. « Margaux m’a entraîné, sourit Laurent Tahar, informaticien. Je fais le même parcours, mais à 55 ans. Ça fait monter l’adrénaline… »
À peine posée après sa prépa Maths sup/Maths spé, Margaux vient d’intégrer il y a quelques jours l’école d’ingénieurs de l’air et de l’espace (IPSA) d’Ivry-sur-Seine, qui forme aux métiers de l’aéronautique. Parcours assez exemplaire. Son objectif ? Remuer ciel et terre pour devenir pilote de chasse.
Et maintenant ? Moral à bloc, la jeune femme est peut-être aux portes de l’équipe de France… Si elle trouve le temps de s’entraîner. On peut lui faire confiance.

Dominique DUWIG
DNA 09/09/2018

vendredi 9 novembre 2018

Jérôme (Bac 1994) et Édouard (Bac 2003) Sauer dans la haute couture du bâtiment


De la rénovation d’un logement à la création d’une usine en passant par le réaménagement des Haras, KS groupe pratique le grand écart. À 60 ans, le constructeur de Bischheim nourrit des ambitions de croissance extra-régionales.

Jérôme (Bac 1994) et Édouard (Bac 2003) , les deux frères ont succédé à leur père Richard Sauer (Bac 1966) à la tête de la société familiale KS groupe. Petits-fils du fondateur, ils sont les représentants d’une lignée d’ingénieurs du bâtiment INSA (ex-ENSAIS), qui l’ont fait grandir.


« Au départ, KS, acronyme de Ketterer et Sultzer, deux sociétés rachetées et fusionnées par notre grand-père, ne faisait que du gros-œuvre », racontent les dirigeants. Mais depuis 20 ans, la société s’est étoffée, intégrant de nombreux corps de métier pour diversifier son offre et son marché. Ce large spectre d’activité en fait un acteur atypique dans l’univers segmenté de la construction.
Aujourd’hui, la galaxie KS groupe agrège 18 filiales dans une quarantaine de spécialités qui vont du bureau d’études au second-œuvre et au design.

Le groupe s’appuie sur une équipe pluridisciplinaire de 320 collaborateurs et revendique un chiffre d’affaires de 143 millions d’euros en 2017. « Il est en forte croissance depuis sept ans », souligne Édouard Sauer. Un développement attesté par les 70 embauches prévues cette année dans tous ses métiers. À ce jour, 53 recrutements ont déjà été réalisés, en majorité en CDI.

La haute couture du bâtiment 

KS groupe bâtit de nombreux logements pour des géants de l’immobilier comme Bouygues ou ICADE. Mais ce généraliste de la construction fait aussi dans la dentelle avec à son actif des réalisations emblématiques. KS a ainsi exécuté le prestigieux chantier de transformation des Haras de Strasbourg, qui abritent aujourd’hui une brasserie gastronomique, un hôtel et un bio cluster. « Ce projet de 15 millions d’euros, c’était de la haute couture du bâtiment, souligne Édouard Sauer. On est allé chercher les meilleurs dans chaque métier. »

Parmi ses références, la reconversion des docks sur la presqu’île Malraux. L’enseigne KS Construction s’affiche actuellement sur la façade de la Maison du Bâtiment en cours de restructuration pour accueillir une opération mixte (La Canopée) avec des logements, une résidence étudiante, des bureaux, des commerces et un toit végétalisé. « Le désamiantage, qui avait nécessité un emballage protecteur de l’immeuble, est terminé. On est dans les travaux de gros-œuvre, pour une livraison fin 2019 », précise Jérôme Sauer. Le groupe a également fait acte de candidature pour le marché de la rénovation des bains municipaux de Strasbourg.

Sans exclusive, le constructeur intervient aussi bien pour la rénovation d’une pièce, d’un restaurant, que pour la création de bureaux, d’hôtels ou de halls industriels. Il a réalisé l’extension du site Alpro Sojinal d’Issenheim (9 000 m2 , 45 millions d’euros) que les deux frères qualifient avec fierté de « troisième plus grand projet industriel agro-alimentaire de France en 2017 ». « Le groupe est capable de concevoir et de livrer des usines clé en main avec les machines, conformément aux performances souhaitées. » Il s’est pour cela associé avec un bureau d’études d’experts en process spécialisé dans l’agro-alimentaire, au sein d’une filiale (CICAL).

La souplesse d’une PME alliée à la force d’un groupe

L’industrie et le tertiaire représentent près de 50 % de son activité, et 50 % sont apportés par les logements et les ouvrages fonctionnels (hôtels, hôpitaux…).
Dans un secteur cyclique et très disputé, KS groupe cultive sa différence. « On est une entreprise de taille intermédiaire (ETI). Cela nous permet de nous positionner à la fois sur des marchés face à des majors du bâtiment et sur des opérations plus petites avec en face des PME locales », fait valoir Jérôme Sauer. Ce que son frère Édouard appelle « faire le grand écart ». « KS allie, dit-il, la souplesse d’une PME à la puissance d’un groupe. Un exercice compliqué de flexibilité et d’agilité qui permet à l’entreprise d’accompagner ses clients et de passer les crises. »
Le groupe s’attache aussi « à faire le lien entre l’ingénierie en bureau d’études et le travail de l’artisan, relèvent ses dirigeants. Cette pluridisciplinarité sous le même toit fait la force de l’entreprise ».

Une clientèle champenoise

Si l’Alsace représente plus de 50 % de son chiffre d’affaires, le constructeur va chercher ces dernières années la croissance en dehors de son territoire. Il rayonne sur la moitié Est de la France avec des antennes à Mulhouse, Paris, Reims, Aix-en-Provence et bientôt au Luxembourg. « On commence à avoir une expertise sur les restructurations lourdes. L’idée, c’est d’implanter notre souplesse d’ETI ailleurs, et de capitaliser sur notre savoir-faire. »

À Reims, avec sa filiale spécialisée CICAL, KS élabore des solutions globales pour des maisons de champagne désireuses de développer et d’optimiser leur outil de production.

Isabelle NASSOY
DNA  08/09/2018

Bénédicte Vogel (Bac 1995) prend les rênes !

Litzler-Vogel, l’esprit de famille

Ses parents et grands-parents – maternels et paternels – étaient pâtissiers. Que croyez-vous qu’il arriva à Bénédicte Vogel ? Elle a repris le flambeau de l’affaire familiale, créée en 1954, avec la complicité d’Eric Guidat, l’homme de l’art.

Les murs sont chargés d’émotion. Ce matin-là, Martine et Bernard Vogel s’affairent dans la boutique. La fille du fondateur de la maison est venue donner un coup de main à sa propre fille, Bénédicte, qui a repris les lieux en 2007. Une affaire de famille en somme. Trois générations de pâtissiers se côtoient sous le même toit : André Litzler, le fondateur de la pâtisserie de la rue d’Austerlitz, sa fille et son gendre, sa petite-fille qui a repris les rênes de l’entreprise. À présent, les rôles sont inversés. Bénédicte est seule maître à bord. Ou presque. La réussite dans une telle entreprise est avant collective.

L’école de Lenôtre
À sa sortie du Gymnase Jean-Sturm, la jeune bachelière ne met pas tous les œufs dans le même panier. Formée à bonne école, elle apprend la patience. S’inscrit en BTS assistance gestion et met un pied dans l’entreprise familiale, alternance oblige. Deux années plus tard, elle fait ses armes chez Lenôtre, à Paris. Une école ô combien exigeante. Son séjour d’un an lui permet d’apprivoiser le comptoir. Méthodiquement, elle commence à tenir son rôle de conseil auprès d’une clientèle extrêmement exigeante.
De retour rue d’Austerlitz il y a tout juste 20 ans, en octobre 1998, la jeune fille se remet à l’ouvrage. Avec de nouveaux arguments. Elle se prend au jeu, impulse son style et met toute son énergie dans l’affaire. « Vous pouvez prendre du temps pour vous », suggère-t-elle un jour à ses parents et grands-parents. Qui font la sourde oreille. Rien à faire, « c’était leur truc »... Elle doit « s’affirmer », reconnaît-elle. « Ce sont des passionnés. » Alors…
Une fois encore, le sourire affleure sur son visage. Et ses yeux pétillent. Bénédicte voue une admiration toute particulière à son grand-père, André Litzler, le patriarche, qui ne manque jamais une occasion de lui faire « un petit coucou »…

Livreur et traiteur, un précurseur
« Il nous aidait encore il y a trois ans, raconte la jeune femme. C’était le “roi de la livraison”. Il avait développé ce service dans les années 50 et 60, car il n’y avait pas encore de frigo dans les maisons. Ses apprentis livraient d’abord à vélo, puis à bord de camionnettes… »
Travailleur acharné, lui-même faisait l’effort les soirs de Noël… Autre innovation de l’époque : la partie traiteur. Ce qui en a surpris quelques-uns.

Les bonnes fées
La question commence à se poser : comment faire perdurer l’entreprise ? Car on ne laisse pas partir, comme cela, 40 ou 50 années de labeur…
Motivée à l’idée de reprendre l’affaire familiale en 2007, Bénédicte sait s’entourer de bonnes fées. À commencer par le talentueux Eric Guidat qui devient le chef pâtissier la même année. L’homme a fait tout son apprentissage ici.
Sandra épaule Bénédicte à la vente. Et puis, Martine et Bernard s’investissent « de façon discrète, selon leur fille. Et plus à plein-temps… » « Pour que mon papa puisse continuer à aller à la chasse… » Pardi !
Avec une dizaine de personnes affectées au laboratoire, quatre à cinq au magasin, la gérante se dit fière de garder la haute main sur toutes les étapes de fabrication.
L’établissement vient de se voir décerner par la corporation des pâtissiers du Bas-Rhin le label « Pâtisserie de Fabrication Maison », qui récompense le travail bien fait. Pâtissier, glacier, chocolatier, mais aussi traiteur : Litzler-Vogel dispose de plus d’une flèche à son arc pour les… 54 prochaines années.

DNA 21 octobre 2018