Litzler-Vogel, l’esprit de famille
Ses parents et grands-parents – maternels et paternels – étaient
pâtissiers. Que croyez-vous qu’il arriva à Bénédicte Vogel ? Elle a repris
le flambeau de l’affaire familiale, créée en 1954, avec la complicité d’Eric
Guidat, l’homme de l’art.
Les
murs sont chargés d’émotion. Ce matin-là, Martine et Bernard Vogel s’affairent
dans la boutique. La fille du fondateur de la maison est venue donner un coup
de main à sa propre fille, Bénédicte, qui a repris les lieux en 2007. Une
affaire de famille en somme. Trois générations de pâtissiers se côtoient sous
le même toit : André Litzler, le fondateur de la pâtisserie de la rue
d’Austerlitz, sa fille et son gendre, sa petite-fille qui a repris les rênes de
l’entreprise. À présent, les rôles sont inversés. Bénédicte est seule maître à
bord. Ou presque. La réussite dans une telle entreprise est avant collective.
L’école de Lenôtre
À sa sortie
du Gymnase Jean-Sturm, la jeune bachelière ne met pas tous les œufs dans le
même panier. Formée à bonne école, elle apprend la patience. S’inscrit en BTS
assistance gestion et met un pied dans l’entreprise familiale, alternance
oblige. Deux années plus tard, elle fait ses armes chez Lenôtre, à Paris. Une
école ô combien exigeante. Son séjour d’un an lui permet d’apprivoiser le
comptoir. Méthodiquement, elle commence à tenir son rôle de conseil auprès
d’une clientèle extrêmement exigeante.
De
retour rue d’Austerlitz il y a tout juste 20 ans, en octobre 1998, la
jeune fille se remet à l’ouvrage. Avec de nouveaux arguments. Elle se prend au
jeu, impulse son style et met toute son énergie dans l’affaire. « Vous
pouvez prendre du temps pour vous », suggère-t-elle un jour à ses parents
et grands-parents. Qui font la sourde oreille. Rien à faire, « c’était
leur truc »... Elle doit « s’affirmer », reconnaît-elle.
« Ce sont des passionnés. » Alors…
Une
fois encore, le sourire affleure sur son visage. Et ses yeux pétillent.
Bénédicte voue une admiration toute particulière à son grand-père, André
Litzler, le patriarche, qui ne manque jamais une occasion de lui faire
« un petit coucou »…
Livreur et traiteur, un précurseur
« Il
nous aidait encore il y a trois ans, raconte la jeune femme. C’était le “roi de
la livraison”. Il avait développé ce service dans les années 50 et 60, car il
n’y avait pas encore de frigo dans les maisons. Ses apprentis livraient d’abord
à vélo, puis à bord de camionnettes… »
Travailleur
acharné, lui-même faisait l’effort les soirs de Noël… Autre innovation de
l’époque : la partie traiteur. Ce qui en a surpris quelques-uns.
Les bonnes fées
La
question commence à se poser : comment faire perdurer l’entreprise ?
Car on ne laisse pas partir, comme cela, 40 ou 50 années de labeur…
Motivée
à l’idée de reprendre l’affaire familiale en 2007, Bénédicte sait s’entourer de
bonnes fées. À commencer par le talentueux Eric Guidat qui devient le chef
pâtissier la même année. L’homme a fait tout son apprentissage ici.
Sandra
épaule Bénédicte à la vente. Et puis, Martine et Bernard s’investissent
« de façon discrète, selon leur fille. Et plus à plein-temps… »
« Pour que mon papa puisse continuer à aller à la chasse… »
Pardi !
Avec
une dizaine de personnes affectées au laboratoire, quatre à cinq au magasin, la
gérante se dit fière de garder la haute main sur toutes les étapes de
fabrication.
L’établissement
vient de se voir décerner par la corporation des pâtissiers du Bas-Rhin le
label « Pâtisserie de Fabrication Maison », qui récompense le travail
bien fait. Pâtissier, glacier, chocolatier, mais aussi traiteur :
Litzler-Vogel dispose de plus d’une flèche à son arc pour les… 54 prochaines
années.
DNA
21 octobre 2018