dimanche 25 octobre 2020

Le Gymnase face à l'assassinat de Samuel Paty


 L'onde de choc de l'assassinat de Samuel Paty a violemment percuté la communauté éducative du Gymnase, comme l'ensemble du système éducatif. Voici les mots adressés par Guy Mielcarek, directeur, à l'ensemble des personnels ce vendredi 23 octobre 2020.  

Les Alumni du Gymnase s'associent pleinement à cette démarche et assurent professeurs et personnels de tout leur soutien.

Chers collègues,

 Nous avons tous été bouleversés, touchés au cœur, sidérés, par l'assassinat de Samuel Paty.

Certains d'entre vous m'ont interpellé, des élèves ont écrit des textes touchants de sincérité, tentant de mettre des mots sur un chagrin inédit, de révolte aussi !

 Il y a déjà eu des attentats meurtriers, qui sont tous encore dans nos mémoires; 11 septembre à New-York, Mohammed Merah en 2012, Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher en janvier 2015, le Bataclan en novembre 2015, plus toutes les attaques en pleine ville avec des armes blanches dans de nombreuses villes européennes . . .  Souvent l'émotion déplaçait des foules dans les rues des grandes villes. Puis l'actualité, la frénésie de l'information, tout en laissant nos mémoires intactes, nous orientait vers d'autres sujets.

 Concernant l'assassinant d'un professeur par le seul fait de son engagement professionnel nous ressentons, à la place qui est la nôtre, une blessure intime, un traumatisme, un chagrin immense.

 Je n'ai pas souhaité réagir à chaud, ignorant d’une part les conséquences immédiates qu'un tel acte pouvait déclencher, et responsable par ailleurs de la sécurité de la communauté éducative dans son ensemble. Il ne s'agissait pas de mettre en péril la sécurité des élèves s'agglutinant chaque jour devant le portail de la place du Temple Neuf ou de tel ou tel personnel qui s'exprimerait dans la presse ou dans les réseaux sociaux. Face à la désinformation, au mensonge, au terrorisme, à la barbarie, il convient de rester ferme, d'exprimer régulièrement par ses paroles et plus encore par ses actes, que la Nation française, que la République, ne renieront pas les valeurs qui les installent ou les constituent. Sans pour cela s'engager dans des opérations de communication à bon compte qui n'auraient que peu d'incidence sur la formation et la prise de conscience réelle par nos élèves de la gravité de la situation. Nous sommes des éducateurs, des enseignants responsables, nous continuerons à assumer ce qui constitue le cœur de nos missions, la formation de citoyens capables de raison, susceptibles de développer un esprit critique capable de débusquer les pressions et les artifices qui font le lit de tous les totalitarismes, qu'ils soient politiques ou religieux.

Dans un premier temps, je souhaiterais vous assurer de mon soutien plein et entier. 
Je sais que nombreux sont ceux qui se sont sentis visés et blessés personnellement par cet assassinat, certains me l'ont dit ou écrit. A ceux-là (en particulier les enseignants d'Histoire, de SES, ou encore d'ECR, qui ont la charge de l'enseignement d'Education Moral et Civique), mais à tous et à chacun, je tiens à vous faire part de ma proximité d'analyse et de ma compassion. Sachez que je serai à l'écoute de vos doutes, de vos interrogations, de vos craintes, légitimes s'il en est. Mais aussi de vos révoltes, de vos envies, de votre volonté de faire plus et mieux encore dans le sens d'une réelle "Education civique".

 Dans un second temps, m'appuyant sur certaines propositions que les un(e)s ou les autres voudront bien me faire parvenir (message ED ou mail), je vous ferai quelques propositions touchant à la fois le symbolique républicain et les valeurs qui caractérisent notre établissement protestant et qui, au sein même de notre quotidien, marqueront dès la rentrée de novembre notre détermination et notre engagement à ne pas laisser de place à ceux qui souhaitent dissoudre notre culture, nos références culturelles dans un relativisme qui permettrait à quelques communautarismes de se positionner comme alternative crédible à un "vivre ensemble" que l'Histoire de France nous a légué. 

Nous serons, cher(e)s collègues, collectivement plus forts que les séparatismes à l'œuvre aujourd'hui. Toutes les instances républicaines seront demain convoquées : Police, Justice, et Ecole. Nous assurerons à notre place la responsabilité collective qui est la nôtre. Nous en mesurons d'ailleurs de façon évidente, et cela n'est pas paradoxal, l'incontournable nécessité. Nous serons à la hauteur de celle réclamée par la situation actuelle, au nom de nos valeurs partagées.

 Je sais pouvoir, pour cela, compter sur chacun d'entre vous.

 Très chaleureusement à tous.