L'onde de choc de l'assassinat de Samuel Paty a violemment percuté la communauté éducative du Gymnase, comme l'ensemble du système éducatif. Voici les mots adressés par Guy Mielcarek, directeur, à l'ensemble des personnels ce vendredi 23 octobre 2020. Les Alumni du Gymnase s'associent pleinement à cette démarche et assurent professeurs et personnels de tout leur soutien.
Chers collègues,
Nous avons tous été
bouleversés, touchés au cœur, sidérés, par l'assassinat de Samuel Paty.
Certains d'entre vous m'ont interpellé, des élèves ont écrit
des textes touchants de sincérité, tentant de mettre des mots sur un chagrin
inédit, de révolte aussi !
Il y a déjà eu des attentats meurtriers, qui sont tous
encore dans nos mémoires; 11 septembre à New-York, Mohammed Merah en 2012,
Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher en janvier 2015, le Bataclan en novembre 2015,
plus toutes les attaques en pleine ville avec des armes blanches dans de
nombreuses villes européennes . . .
Souvent l'émotion déplaçait des foules dans les rues des grandes villes.
Puis l'actualité, la frénésie de l'information, tout en laissant nos mémoires
intactes, nous orientait vers d'autres sujets.
Concernant l'assassinant d'un professeur par le seul fait de
son engagement professionnel nous ressentons, à la place
qui est la nôtre, une blessure intime, un traumatisme, un chagrin immense.
Je n'ai pas souhaité réagir à chaud, ignorant d’une part les
conséquences immédiates qu'un tel acte pouvait déclencher, et responsable par
ailleurs de la sécurité de la communauté éducative dans son ensemble. Il ne
s'agissait pas de mettre en péril la sécurité des élèves s'agglutinant chaque
jour devant le portail de la place du Temple Neuf ou de tel ou tel personnel
qui s'exprimerait dans la presse ou dans les réseaux sociaux. Face à la
désinformation, au mensonge, au terrorisme, à la barbarie, il convient de
rester ferme, d'exprimer régulièrement par ses paroles et plus encore par ses
actes, que la Nation française, que la République, ne renieront pas les valeurs
qui les installent ou les constituent. Sans pour cela s'engager dans des
opérations de communication à bon compte qui n'auraient que peu d'incidence sur
la formation et la prise de conscience réelle par nos élèves de la gravité de
la situation. Nous sommes des éducateurs, des enseignants responsables, nous
continuerons à assumer ce qui constitue le cœur de nos missions, la formation
de citoyens capables de raison, susceptibles de développer un esprit critique
capable de débusquer les pressions et les artifices qui font le lit de tous les
totalitarismes, qu'ils soient politiques ou religieux.
Dans un premier temps, je souhaiterais vous assurer de mon
soutien plein et entier. Je sais que nombreux sont ceux qui se sont sentis
visés et blessés personnellement par cet assassinat, certains me l'ont dit ou
écrit. A ceux-là (en particulier les enseignants d'Histoire, de SES, ou encore
d'ECR, qui ont la charge de l'enseignement d'Education Moral et Civique), mais
à tous et à chacun, je tiens à vous faire part de ma proximité d'analyse et de
ma compassion. Sachez que je serai à l'écoute de vos doutes, de vos
interrogations, de vos craintes, légitimes s'il en est. Mais aussi de vos
révoltes, de vos envies, de votre volonté de faire plus et mieux encore dans le
sens d'une réelle "Education civique".
Dans un second temps, m'appuyant sur certaines propositions
que les un(e)s ou les autres voudront bien me faire parvenir (message ED ou
mail), je vous ferai quelques propositions touchant à la fois le symbolique
républicain et les valeurs qui caractérisent notre établissement protestant et
qui, au sein même de notre quotidien, marqueront dès la rentrée de novembre
notre détermination et notre engagement à ne pas laisser de place à ceux qui
souhaitent dissoudre notre culture, nos références culturelles dans un
relativisme qui permettrait à quelques communautarismes de se positionner comme
alternative crédible à un "vivre ensemble" que l'Histoire de France
nous a légué.
Nous serons, cher(e)s collègues, collectivement plus forts
que les séparatismes à l'œuvre aujourd'hui. Toutes les instances républicaines
seront demain convoquées : Police, Justice, et Ecole. Nous assurerons à notre
place la responsabilité collective qui est la nôtre. Nous en mesurons
d'ailleurs de façon évidente, et cela n'est pas paradoxal, l'incontournable
nécessité. Nous serons à la hauteur de celle réclamée par la situation
actuelle, au nom de nos valeurs partagées.
Je sais pouvoir, pour cela, compter sur chacun d'entre vous.
Très chaleureusement à tous.