Au sous-sol de la paroisse protestante de
Cronenbourg-Cité, domaine de l’association Les Disciples, sont entassés des centaines
de sacs remplis de cadeaux. Chacun d’entre eux est destiné à un enfant du
quartier, dont le prénom est inscrit sur le paquet… Et, sauf exception, chacun
trouvera son destinataire : le système est très bien rodé.
« C’est la 35e année que Les
Disciples organisent cette opération de Noël ; les familles sont repérées au
travers de notre action sociale : le vestiaire, la banque alimentaire ou le
soutien scolaire », explique Marc Ostertag, coordinateur de l’association. « Le
cadeau, c’est le moyen, mais le véritable objectif, c’est la rencontre »,
insiste-t-il.
Faire le chemin vers l’autre
Cette année, près de 350 jeunes se sont portés
volontaires pour prêter main-forte à l’association. Ces adolescents, scolarisés
dans divers lycées et collèges du département, ne sont pas venus les mains
vides : ils ont procédé eux-mêmes à la collecte des jeux et jouets. « Ils font
le chemin vers l’autre de A à Z », sourit le pasteur Gérard Haehnel.
Catherine est là en tant que maman d’une élève de
Truchtersheim, pour encadrer les collégiens. Issue d’une famille de réfugiés
vietnamiens qui vécut dans cette cité, elle fut de l’autre côté de la porte,
voici 33 ans. « J’avais 10 ans et je me souviens de l’importance de cette
visite pour nous, de l’échange humain, de la gentillesse sans arrière-pensée
religieuse. J’ai eu le sentiment que nous n’étions pas mis à l’écart, que l’on
pensait à nous », se remémore-t-elle avec émotion.
Collèges et lycée n’ont eu aucun mal à recruter des
bénévoles, tant cette opération suscite l’enthousiasme. « C’est une bonne
action qui nous fait aussi plaisir à nous », avoue Lisa, en classe de première
au lycée Jean-Sturm. « J’ai voulu revenir, car il y a un lien qui se créé :
l’an dernier, nous avons joué avec les enfants après leur avoir offert les
cadeaux. »
Bénédicte et Charlotte, elles aussi, reprennent du
service. Les deux lycéennes sont membres actives de l’association Les
Disciples, où elles viennent trouver de l’aide pour leurs devoirs – auprès
d’enseignants et d’étudiants – et aussi donner un coup de main. Pour aller
frapper à la porte de deux familles logées dans une tour de la rue Keppler,
elles font équipe avec Hélène et Clémence.
Bénédicte, Charlotte, Hélène et Clémence frappent
ainsi à la porte d’un appartement où vivent deux familles géorgiennes. Les
quatre enfants trépignent d’impatience, surtout les deux garçons, âgés d’une
dizaine d’années.
« C’est le plus cadeau que j’ai jamais reçu ! »,
s’exalte Lucas, dans un français parfait, après avoir déballé un waveboard,
dont l’instabilité semble inquiéter sa maman… L’accueil est tout aussi
chaleureux dans le deuxième appartement, où vit depuis deux mois une famille
d’Arméniens, eux aussi demandeurs d’asile.
La maman, la grand-mère et une voisine, qui fait
l’interprète, insistent pour servir un café, accompagné d’une orange coupée en
rondelles et de chocolat noir. La conversation s’engage, elle porte sur les
traditions de Noël en France et en Arménie, ou l’avenir professionnel de ces
jeunes femmes et filles… La mère de famille aimerait venir faire du bénévolat
au sein de l’association Les Disciples, dont Bénédicte lui note les
coordonnées. Chacun se quitte, ému. « Je ne m’attendais pas à vivre cela,
c’était formidable », lance Hélène, sur le chemin du retour.
DNA 13/12/15