Charlotte Boujassy (Gymnase, 2004) partage ses souvenirs du Gymnase et de son orientation professionnelle, de ses hésitations et tâtonnements jusqu’à sa carrière européenne en Ressources Humaines. A partir de ses acquis scolaires, de sa trajectoire et de son expérience en RH, elle nous livre d’intéressantes réflexions sur le monde de l’emploi, les lignes de force d’une société en pleine évolution : nouvelles approches face à l’emploi, nécessité de conjuguer savoir-faire et savoir être etc…
Mes années Gymnase
Je suis entrée au Gymnase en 6ème et y ai passé sept ans jusqu'à mon bac (ES) en 2004. Avant moi, ma maman (Brigitte Muller) y avait également fait sa scolarité (bac 1978)
Mes soeurs (Maïa et Lara) y ont aussi fait une partie de leur scolarité - aussi, je crois que l'on peut dire que le Gymnase est une affaire de famille et que si j'habitais à Strasbourg, mes filles seraient la quatrième génération à passer par la Place des Etudiants tous les matins.
Ce dont je me suis rendu compte en discutant et comparant les années collège / lycées avec d'autres personnes néanmoins, c'est que bien d'au-delà de la qualité des cours, c'est la variété des expériences que l'on nous proposait en dehors des heures de classe déjà à l'époque - et qui n'a cessé de croître depuis, qui était véritablement à part comparée aux autres établissements.
En sixième nous sommes partis au ski en Autriche, en 5ème nous avons fait
du kayak en Ardèche, en 4ème nous avons effectué un stage de voile, en 3ème
nous sommes allés faire du ski de fond, en seconde nous avons eu la chance de
faire un échange avec un lycée de Karlsruhe, en en première nous sommes partis
à Cracovie.
Et rien de tout cela n'aurait été possible sans l'engagement des professeurs qui organisaient tout et acceptaient d'encadrer des adolescents "énergiques" sur plusieurs jours. Cet article est ainsi pour moi l'occasion de remercier tous ceux qui nous accompagnés pendant ces années si fondamentales dans la formation des adultes que nous sommes devenus.
Au fur et à mesure que l'orientation professionnelle se précisait pour la
plupart de mes camarades, je restais pour ma part incapable de choisir une voie
plutôt qu'une autre et commençais vraiment à me demander ce que j'allais bien
pouvoir faire dans un futur de moins en moins lointain.
Après notre diplôme obtenu en juin 2008, je suis alors partie en Allemagne en tant que jeune fille au pair l'été, puis une année à Madrid où j'ai enseigné le français et perfectionné mon espagnol. C'est pendant cette année que je me suis dit que les ressources humaines seraient peut-être un bon domaine pour moi, puisque c'était une fonction qui permettait de rester en contact avec toutes les autres.
Suite à mes candidatures, j'ai alors été prise dans un des meilleurs Master II de RH de France (CIFFOP / Paris II Assas). Il était en apprentissage, et j'ai réussi à obtenir un poste au siège d'Airbus Group à Paris (EADS à l'époque) en RH Marketing (où l'on cherche à développer l'attractivité de la marque employeur, notamment auprès des jeunes diplômés).
J'ai ensuite eu envie de partir en Allemagne pour rajouter une expérience internationale à mon CV et
acquérir un allemand professionnel. Recommandée par ma manager, j'ai ainsi pu partir en VIE (volontariat internationale en entreprise) à Munich en 2010, toujours en RH, dans le département "Talent and Executive Management", dont l'objectif était d'identifier et de développer les futurs dirigeants du groupe.J'ai eu un coup de cœur pour la capitale bavaroise, et après un bref passage à Paris à nouveau chez Airbus Group en "Leadership Development" (où l'on élaborait les formations pour les managers de l'entreprise), je me suis installée définitivement à Munich en février 2014.
Depuis, j'ai travaillé quatre ans chez Texas Instruments en tant que coordinatrice des opérations de formation pour l'Europe, et depuis avril 2019, je suis responsable du développement des talents en Europe chez Daiichi Sankyo, une entreprise pharmaceutique japonaise.
Finalement, cela fait plus de dix ans maintenant que je travaille en "learning & development", qui est une spécialité au sein de la fonction RH. Ce n'est pas un parcours "idéal" ou "classique" dans le sens où est censés passer par un peu toutes les métiers RH, mais cela s'est fait ainsi suite à un mélange de choix et d'opportunités personnelles et professionnelles - et au final, sans avoir eu de plan de carrière défini ni de source d'inspiration proche (personne dans ma famille ne travaille dans de grandes entreprises et encore moins en RH), je me suis rendu compte récemment que j'étais là où je devais être, tant mon métier me passionne et reste source d'apprentissage au quotidien.
Quelques réflexions sur l'orientation professionnelle, après plus de 10 ans en développement RH (formation, gestion des talents, développement des dirigeants)
Qu'est-ce qu'une "carrière réussie" en 2021?
Je n'écris rien de nouveau en soulignant qu'aujourd'hui, les parcours sont de moins en moins linéaires et que beaucoup de personnes sont amenées à exercer des métiers qui n'ont à peu près rien à voir avec leurs études d'origine - ou se réorientent totalement après avoir réalisé que la voie qu'elles avaient initialement choisie ne leur convient pas du tout : les articles fleurissent sur les ingénieurs devenus bergers, les diplômés d'écoles de commerce passant un CAP pâtisserie etc.
En entreprise, on voit aussi de plus en plus de jeunes collaborateurs prometteurs, pour lesquels "passer managers" ne fait plus rêver. Il y a également les congés sabbatiques et parentaux qui régulièrement s'accompagnent de questionnement sur l'orientation, les couples à double carrière ("dual career couple" dans le jargon anglophone) qui amènent parfois l'un, parfois l'autre à se mettre entre parenthèses pendant un temps.
Pour ceux qui gravissent les échelons de manière plus classique, on remarque que ce ne sont pas nécessairement les "premiers de la classe“ qui sont promus, mais ceux qui savent le mieux développer leur réseau et s'en servir au moment opportun - et ceux qui de façon générale, ont appris à "se vendre" mais sont aussi capables de rebondir en cas d'échec et d'apprendre de leurs erreurs (en résumé, de se montrer résilients).
S'il faut donner quelques pistes pour les adolescents d'aujourd'hui et leurs parents, voici une petite liste non exhaustive mais pratique, de ce que l'on peut faire en attendant de "trouver sa voie" et qui s'applique aussi bien aux personnalités plus artistiques qu'à ceux qui sauront s'épanouir en classe prépa:
- Cultiver sa curiosité : avoir plusieurs centres d'intérêt ou une passion en particulier même très jeune, et qui n'a rien à voir avec l'école, contribue à développer ce sens du fameux "équilibre vie perso / vie professionnelle" - tout en permettant de rencontrer des personnes d'autres horizons qui contribueront directement ou indirectement à donner des idées sur ce à quoi pourrait ressembler (ou pas) l'avenir professionnel de nos lycéens.
- Savoir établir et entretenir des relations durables : on parle souvent des "soft skills" en entreprise, que je traduis en général par compétences interpersonnelles telles que la communication ou la gestion des conflits. Autant de savoir-être que l'on acquiert lors des temps et activités extra-scolaires qu'il faut (absolument) valoriser et faire perdurer, même lorsque les examens approchent et que l'on serait tenté de s'enfermer dans sa chambre pour réviser non-stop.
- La prise de parole : combien de personnes brillantes se retrouvent tétanisées lorsqu'il faut prendre la parole ? Pourtant, que l'on soit entrepreneur, artiste, médecin ou jeune cadre, savoir exprimer ses idées de manière claire et assurée permet d'avancer mieux et plus vite. Aussi, ne manquez pas une occasion de pratiquer : que ce soit à l'école lors des exposés et des activités extra-scolaires (encore elles !), ou lors d'événements familiaux (une poésie à Noël pour les plus jeunes, un petit discours pour l'anniversaire du papi etc): soyez volontaires et ne manquez pas une occasion de vous exercer. On ne devient un bon orateur qu'en pratiquant, et il n'y pas de raison d'attendre d'avoir atteint l'âge adulte !
- L'apprentissage et la pratique des langues : c'est une lapalissade, mais maîtriser l'anglais est devenu une base et beaucoup d'offres d'emploi précisent "d'autres langues européennes seraient appréciées" - de façon générale, être polyglotte ouvre des portes souvent inattendues. Pour cela, au-delà des plus ou moins bonnes notes que l'on peut obtenir, prendre plaisir à pratiquer une langue et la considérer comme un outil de communication davantage qu'une matière scolaire est encore plus fondamental : peu importe que la grammaire ou la prononciation soient correctes. Ici, stages de sport en Angleterre, échanges scolaires, année au pair après le bac etc., toute occasionest bonne à saisir. En tant qu'Alsacienne vivant à présent en Allemagne je ne peux que bien sûr qu'encourager un apprentissage de la langue de Goethe qui malheureusement se perd. Pourtant, Dieu sait que j'ai maudit ma maman de me forcer à prendre l'allemand en LV 1 … mais que je l'ai bénie quand je me suis retrouvée à devoir faire l'école à la maison pour mon aînée en pleine pandémie (photo à l'appui ci-contre)!
Voilà un résumé de ce qui après plus de 10 ans passés à travailler autour
des problématiques de la gestion de carrière, permet selon moi de réussir à
s'épanouir professionnellement dans la durée, au fur et à mesure de nos
orientations et réorientations professionnelles.
Charlotte Boujassy