Originaire de Strasbourg-Neudorf et installée à
Obernai, Adèle Schramm, 38 ans, est l’une des meilleures pilotes françaises en
navigation aérienne sportive.
Un peu comme Obélix, elle est tombée dans la marmite quand elle était toute
petite. Comme d’autres pouvaient accompagner leurs parents sur des terrains de
foot, la jeune Adèle suivait son père à l’aérodrome du Polygone à
Strasbourg-Neuhof.
« Il volait le week-end et j’étais tout le temps avec lui », se
remémore l’intéressée, aînée d’une fratrie de trois enfants (deux filles et un
garçon).
Contrôleuse aérienne à Entzheim
Le pneu installé sous ses fesses dans le planeur, c’est un peu sa Madeleine
de Proust à elle. Sur le bitume devant le local de l’aéroclub Polygone 67, elle
a appris à marcher puis à faire de la bicyclette. C’était un peu sa deuxième
maison, à 500 mètres à peine de sa résidence principale située dans le Neudorf.
« Dès que j’avais du temps, j’allais là-bas. »
En France, on ne peut voler avant l’âge de 15 ans. Le jour même de son
quinzième anniversaire, les bougies du gâteau encore chaudes, elle a donc
accompli son premier vol. « J’attendais ce moment avec beaucoup
d’impatience, se souvient l’ancienne collégienne du Gymnase Jean-Sturm. Quand
on vole, on a un sentiment de liberté, c’est fabuleux. »
Celle qui voulait devenir astronaute puis pilote de ligne a finalement
embrassé la carrière de contrôleuse aérienne. Une profession qu’elle exerce
depuis 2003 à l’aéroport d’Entzheim.
En parallèle, elle continue de voler régulièrement, notamment au-dessus du
Haut-Koenigsbourg, des Vosges ou encore du Mont Sainte-Odile, ses
« spots » de référence.
Il y a quatre ans, elle découvre l’existence de compétitions en sport
aérien. Un tournant dans la vie de cette ancienne judokate ayant participé à
plusieurs championnats d’Alsace avec le kimono du SUC.
Atterrir dans un couloir de 12m
« Voler est ma passion et je suis compétitrice dans l’âme, c’était
donc fait pour moi », en sourit aujourd’hui la jeune femme qui navigue à
bord d’un avion de tourisme (Cessna 152 ou 172).
Adèle Schramm pratique trois disciplines. Avec Alexis Fuchs, elle est
d’abord co-pilote en rallye aérien. Des check-points sont installés sur un
tracé. Il faut les activer en un temps limité. Aussi, des photos illustrent des
endroits qu’il faut retrouver et placer sur une carte pendant le vol. Le duo a
fini 5e aux championnats du Monde 2018 en Slovaquie et 2e par équipes avec la France.
Le binôme s’aligne aussi en « Air Navigation Race » (ANR). Cette
fois, c’est Adèle qui pilote. « Un tuyau est matérialisé sur une carte, on
doit toujours naviguer dedans. On prend des pénalités quand on en sort. Celui
qui en a le moins gagne », souligne la médaillée de bronze dans cette
discipline aux Mondiaux 2017 en Espagne.
Enfin, la mère de trois enfants (Célian 13 ans, Amaury 11 ans et Charline 6
ans) concourt, en solo, en pilotage de précision. Il s’agit de suivre un tracé
aérien en un temps chronométré, alliant donc la vitesse à l’habileté en vol.
Comme en ANR, l’atterrissage est évalué. « On doit toucher les roues sur
un couloir de 12m de large. » Adèle a pris la 3e place aux
Mondiaux 2017.
En pleine saison (d’avril à octobre), l’Obernoise vole toutes les semaines
pour son plaisir et/ou l’entraînement. En 2019, l’élite mondiale du pilotage de
précision sera réunie à Castellòn (Espagne).
En rallye aérien, ce sera en 2020 en Afrique du Sud. La navigatrice de 38
ans joue cartes sur table. « Quand je m’inscris à une compétition, c’est
pour gagner. » Ainsi va la vie d’Adèle.
Décision contestée
Dans les compétitions hexagonales, la Fédération française aéronautique
(FFA), dont Adèle Schramm est élue au comité directeur, a décidé, l’année
passée, d’opérer la distinction entre hommes et femmes dans les classements. La
pilote originaire du Neudorf est « totalement contre » cette
décision.
« C’est ridicule de faire une différence, fulmine-t-elle. Dans nos
disciplines, le côté physique n’est pas très présent, les filles ne sont donc
pas désavantagées. J’espère qu’on reviendra vite en arrière. »
Lors des derniers championnats de France de pilotage de précision, il n’y
avait que quatre engagées et Adèle a gagné. « Ce que je retiens, c’est ma
2e place au classement scratch. C’est ce résultat-là
qui a un sens. ». En plus d’être compétitrice, la pilote est aussi
perfectionniste.
Avec deux amis, elle a également parcouru toutes les îles
des Caraïbes il y a quatre ans. «On allait d’île en île à bord de l’avion qu’on
pilotait, se souvient Adèle. On dormait dans des gîtes la nuit et on faisait
des visites durant une partie de la journée. C’était incroyable. L’avion te
permet de découvrir l’endroit de façon totalement différente. En plus, quand
c’est ta passion, c’est le top. »
DNA 16 janvier 2019