Il était une fois, en 1985, un (jeune) professeur épris de modernité et
de technicité qui souhaitait rendre plus aisée l’intégration des nouveaux
élèves de 6ème au Gymnase.
Marc Zillhardt le pensait. Il le fit.
Voici ce petit bijou d'époque qui vous plonge dans une rentrée d’autrefois
au Gymnase. Des générations d’anciens élèves y retrouveront bien des visages,
des locaux, des ambiances… Et pour ceux qui n’ont pas connu cet univers, voici l’occasion
de plonger dans la mémoire des lieux et des esprits qui les ont animés.
Mais cette présentation n’aurait aucun intérêt sans donner la parole au
réalisateur :
Cap sur la 6, juin 1985,
moyen métrage de 28 mn et quelques secondes, tourné en super-8 à l’aide d’une
caméra Braun Nizo 6056 sur pellicule Kodachrome sonorisée a
posteriori en stéréo par double piste magnétique, à l’exception de deux
séquences d’interview filmées avec prise
de son en direct…
Un peu rébarbatif certes, mais
voilà pour l’aspect technique, aux concepts étrangement (délicieusement ?)
obsolètes.
D’un point de vue plus historique,
disons que ce petit film d’amateurs est sans doute le dernier avatar remarqué
d’une expérience pédagogique intitulée « Langage de l’image et
communication audiovisuelle » dans
laquelle s’était engagé le Gymnase dès l’année scolaire 1983-1984, sous l’autorité
et avec le soutien de son Proviseur, M. Jean-Paul Weber.
C’est dans ce cadre précis
que, secondé par une petite équipe d’élèves motivés, j’avais conçu et réalisé ce
film. L’objectif en était assez simple : il s’agissait de fournir une sorte
de guide pratique au nouvel arrivant, au seuil de son entrée en sixième, tout
en utilisant au maximum, fût-ce maladroitement, les ressources de la
communication audiovisuelle telles qu’on pouvait les concevoir à l’époque. D’où
par exemple les deux voix off, alternativement féminine et masculine,
apostrophant à la 2e personne
du singulier le personnage de l’élève (incarné alternativement par Pierre et
Alban). D’où également le scénario de la dramatisation humoristique de
l’élève-qui-arrive-en-retard et la course contre la montre dans le labyrinthe
des couloirs et des salles, figures métaphoriques d’un emploi du temps désormais
caractérisé par la valse des matières et le défilé subséquent des professeurs. Pour
donner plus de force expressive au propos, nous n’avions pas hésité à recourir
à quelques « effets spéciaux », trucages rudimentaires, voire
cascades audacieuses comme cette chute contrôlée
dans le grand escalier. Il est vrai que nous avions poussé le perfectionnisme
jusqu’à vouloir synchroniser l’apparition rythmée des lettres du générique avec
le fond sonore musical des Carmina Burana.
Un vrai travail de moine, que le montage fastidieux de ces dizaines de coupures aux images
minuscules, collées bout à bout à l’aide de petites vignettes ad hoc ! On avait beau entrevoir les
prémices de la numérisation, c’était
encore l’époque du « cousu main » !
Se pourrait-il qu’il y eût dans
cette exclamation comme une once de
regret ?
Nous y voilà ! Nostalgie,
quand tu nous tiens ! Elle se manifeste dès les premières images et les
premiers accords : yesterday, nostalgie
de la fin des grandes vacances, nostalgie du cocon rassurant des classes
primaires (tous les jours le même maître dans la même salle de classe !).
Mais au-delà de la nostalgie plus
ou moins liée à toute rentrée (voire non-rentrée, quand on est
retraité !), il y a la magie de l’apparition mystérieuse du film-cadeau
offert au jeune Pierre tel un sésame pour ouvrir l’avenir…Qui sait, peut-être cette magie opère-t-elle toujours, autour d’une
vieille bobine de cinéma oubliée, au discours daté et dont le décalage nous
porte à sourire. Elle nous replonge aujourd’hui dans un passé merveilleusement
idéalisé, avec nos frais visages d’enfants ou de jeunes profs, encore préservés
pour quelque temps par ces quelques mètres de fragile pellicule.
Film dans le film et temps dans
le temps, il se pourrait bien que
l’alchimie de cette double mise en abyme ne fût pas tout à fait étrangère à la
douce émotion que, de l’avis de nombre d’entre nous, nous pouvons encore
éprouver devant ces quelques images sauvées momentanément de l’oubli.
Marc Zillhardt
12 septembre 2017