dimanche 21 septembre 2025

La communauté scolaire du Jakob-Sturm-Gymnasium (1940-1944) dans le système nazi

 Une dizaine de caisses entreposées dans les greniers du Gymnase contenaient des documents peu inventoriés, parfois considérés avec suspicion. L’organisation d’un local dédié aux archives pour rassembler l’ensemble des sources encore présentes dans un établissement scolaire, à la longue histoire, a permis d’inventorier ces caisses : elles contenaient la vie et le fonctionnement du Gymnase de 1940 à 194, sous férule nazie.


 
Florence Malhamé
, agrégée d’histoire enseignante au Gymnase et mastérante en Histoire des mondes germaniques à l’Université de Strasbourg, s’y est plongée pour un mémoire intitulé :
un lycée dans le système national-socialiste de l’Alsace annexée : la communauté scolaire du Jakob-Sturm-Gymnasium (1940-1944).

Soutenu avec brio le 15 septembre 2025, ce mémoire explore avec lucidité la réalité concrète d’un établissement scolaire,  ceux qui y vivent et ceux qui l’animent, entre ombres et lumières, dans le contexte d’une région annexée, intégrée dans le Reich.

Le préambule du mémoire situe des enjeux : « L'école allemande fait partie de l'ordre éducatif national-socialiste : elle a pour mission de former l'homme national-socialiste en association avec les autres forces éducatives du peuple allemand ». Cette phrase, parue le 6 septembre 1940 dans les Strassburger neueste Nachrichten, quatre semaines avant la première rentrée scolaire dans l’Alsace annexée à l’Allemagne national-socialiste montre l’ampleur des bouleversements connus par l’école et plus largement la société alsacienne de 1940 à 1944.

Le Gymnase est intégré dans le dispositif de formation : En octobre 1940, les établissements scolaires rouvrent en Alsace, sous de nouveaux noms, de nouvelles autorités de tutelles et un corps professoral en partie renouvelé. Pour le « vieux Gymnase protestant de Strasbourg »(1), comme il est couramment appelé dans les courriers, cette ouverture se fait sous le nom de Jakob-Sturm-Gymnasium. La municipalité de Strasbourg remplace la tutelle du Chapitre de Saint-Thomas, le statut d’établissement privé ayant disparu avec l’annexion.

Lors de la rentrée de 1940, il devient l’unique Gymnasium de Strasbourg, le seul établissement mixte à poursuivre l’enseignement des humanités classiques et notamment du grec ancien. Il devient donc le lycée de tous les jeunes qui suivaient auparavant un enseignement de grec quel que soit leur établissement d’origine et leur lieu de résidence. S’ouvrent simultanément plusieurs Oberschulen :

Bismarck (Kléber Palais – Collège Foch aujourd’hui) Karl-Roos (Kléber Saint Jean avant 1940, disparu) Friederikenschule (lycée des Pontonniers). Les Marie Hardtschule (Lucie Berger) et Gottfried von Strassburgschule (Notre Dame) ouvriront ultérieurement  (Im Aufbau) mais pas la Goetheschule (St Etienne), devenue hôpital militaire.

Le mémoire traite du sujet sous plusieurs aspects: le bouleversement et continuité de la vie scolaire dans l’Alsace annexée et au Gymnase, la direction et l’équipe pédagogique du Jakob-Sturm-Gymnasium face à l’annexion. Il s’intéresse particulièrement à la trajectoire d’Arthur Cullmann, seul alsacien durablement au poste de directeur. Il analyse aussi la composition ainsi que l’évolution du corps professoral au fil des années de conflit ainsi que les élèves et leurs familles : qui sont-ils ?

Un dernier chapitre se penche sur comment être élève au Jakob-Sturm-Gymnasium, entre exigence scolaire et réalités de l’annexion et de la guerre.

Si ce remarquable travail de mémoire se nourrit essentiellement des archives préservées du Gymnase, il a aussi bénéficié de témoignages directs comme celui de Robert S., entré au Jakob-Sturm-Gymnasium en 1943 et à la mémoire extraordinaire, de documents retrouvés par d’anciens parents d’élèves ou de familles dont l’un des membres avait été scolarisé entre 1940 et 1944.

Florence Malhamé a enrichi son mémoire de nombreux documents extraits de ses sources qui illustrent au mieux le sujet traité. Comme la germanisation des noms:

A l’occasion d’évènements organisés par les Archives d’Alsace, elle a pu présenter et approfondir plusieurs thèmes qu’elle a exploré, contribuant à une meilleure connaissance de la réalité de cette période historique.


Sujets présentés: « Georges Weinhard et ses camarades. Parcours de lycéens résistants en Alsace annexée » - « Arthur Cullmann, directeur du Jakob-Sturm Gymnasium de 1941 à 1944, entre ombre et lumière »

(1) Le Gymnase Protestant, devenu Jakob-Sturm-Gymnasium de 1940 à 1944, prend le nom de Gymnase Jean Sturm en 1947, sur décision du Chapitre de St Thomas, administrateur de la Fondation Haute Ecole. 

Les Alumni du Gymnase sont très reconnaissants à Florence Malhamé pour avoir analysé ces archives avec une exigence et un professionnalisme remarquables. 

Il la félicitent vivement pour la grande qualité de son mémoire, indispensable pour mieux comprendre à la fois la vie dans un pays en guerre mais aussi l’impact humain, au quotidien, d’une dictature totalitaire au sein d’un établissement scolaire.

Par ce lien vous pouvez accéder à l’intégralité du mémoire :

https://www.calameo.com/read/0033797930b3726fde28d



vendredi 19 septembre 2025

Rolands Lappuke (Bac 1973), le plus alsacien des Lettons

 Les DNA, sous la plume de Nicolas Roquejoffre, ont tracé le portrait du plus Letton des anciens élèves du Gymnase,  fin août 2025.

Né en France, Rolands Lappuke a fait ses études à Strasbourg où vivaient ses parents, réfugiés politiques après-guerre. L’ancien ambassadeur vit depuis 2016 en Lettonie, son pays marqué par les totalitarismes nazi et soviétique et dont la société s’est en grande partie engagée auprès des Ukrainiens.

Avec malice, Rolands Lappuke montre l’adresse de la rue qui longe une partie de l’ambassade de Russie au cœur de Riga. « En 2022, le parlement letton a décidé de rebaptiser cette voie en “rue de l’indépendance de l’Ukraine” ».

Dans cette même artère, suspendue devant le musée d’histoire médicale, une immense affiche présentant un Vladimir Poutine mortifère, œuvre d’un collectif d’artistes, défie les diplomates russes.

Depuis trois ans maintenant, les drapeaux jaune et bleu de l’Ukraine flottent devant les façades de certains bâtiments publics ou édifices culturels. « Après le début de l’offensive russe, les Lettons ont eu une réaction spontanée de soutien à l’Ukraine, raconte Rolands Lappuke. Tous les jours, des centaines de gens se rassemblaient devant l’ambassade pour soutenir les Ukrainiens. Les Lettons se sont mobilisés, inéluctablement. Ils voyaient des chars russes franchir la frontière, les mêmes qui nous avaient envahis en 1940 ».

Cet ancien diplomate a également apporté son soutien et continue de le faire, notamment en participant à la collecte de matériels, notamment des drones, qui partent ensuite vers le front. « Nous sommes en guerre mentalement, assure-t-il. Nous sommes reconnaissants de leur sacrifice ».

Ambassadeur en Espagne, au Portugal, en France…

Né à Paris, Rolands Lappuke a longtemps vécu en Alsace où il a suivi une scolarité au Gymnase Jean-Sturm puis à l’université Louis-Pasteur où il a décroché un doctorat en neurosciences. 

Sa carrière de diplomate letton, démarré deux ans après l’indépendance de la Lettonie, l’a notamment mené en Allemagne, au Portugal, en Espagne, en France (de 2003 à 2007). Son dernier poste, de 2014 à 2016, fut à Strasbourg, comme représentant auprès du Conseil de l’Europe.

Il n’était pas acquis que cet homme né en 1956 pose définitivement ses cartons dans un pays que ses parents avaient fui après la guerre. « Quand je suis allé la première fois en Lettonie, en 1975, je me suis juré de ne plus y revenir ». La chape de plomb soviétique l’en avait clairement dissuadé.

Et puis ses parents ne vantaient pas vraiment les charmes d’une Lettonie durablement marquée par deux totalitarismes : le communisme et le nazisme. « Je les mets sur un pied d’égalité concernant le manque d’humanité », dit-il. Les musées de l’occupation et du KGB (service de renseignement de l’URSS), au centre de Riga, rappellent ad nauseam les horreurs des nazis et des Soviétiques. Tandis que les premiers ont éliminé plus de 90 % de la population juive de ce petit pays et de si nombreux partisans, les autres torturaient et tuaient les opposants au régime de Moscou.

« N’oublions pas que le pouvoir russe est impérialiste »

La main de fer russe hante toujours les esprits lettons, notamment ceux qui ont justement connu l’annexion. Aujourd’hui, « il n’y a pas de peur mais plutôt de l’appréhension dans la société, estime Rolands Lappuke. Une invasion peut avoir lieu. N’oublions pas que le pouvoir russe est impérialiste. Qu’est-ce qui pourrait l’arrêter ? »

Celui qui se félicite d’être monté « sur le bateau de l’indépendance lettone » trouve beaucoup de points communs entre son Alsace presque natale et la Lettonie, territoires annexés, ballottés entre grandes puissances, marqués par les drames des guerres mondiales.

 L’histoire de ses parents est intrinsèquement liée à la capitale alsacienne. « Ma mère a traversé l’Europe avec sa cousine. Elles sont arrivées à Strasbourg en 1945. Mon père, lui, a fui son pays et s’est retrouvé à Lunéville en 1946. Il a fait des études de théologie puis est devenu pasteur luthérien trois ans plus tard. Il a alors pris ses fonctions à Strasbourg en 1950. C’est une jeune lettone qui est venue l’accueillir à la gare. Ils se sont mariés un an plus tard ! » Le couple est enterré à Westhoffen où le père de Rolands fut pasteur.

 Le couple Lappuke compte revenir à Strasbourg d’ici la fin de l’année. Rolands pour retrouver une partie de ses anciens camarades du lycée et son épouse pour s’extasier devant les décorations de Noël. Ils n’oublieront pas de rendre visite à la sœur de Rolands, restée, elle, en terre d’Alsace.

L’occasion de partager d’autres talents avec ses anciens et toniques condisciples lors de leurs retrouvailles ?

jeudi 18 septembre 2025

Funkindustry, l’étonnant destin de trois Gymnasiens stars en Asie


 Caves et Gymnase

Le groupe s’est formé sur les bancs du Gymnase Jean Sturm en 2012 et a fait bien du chemin depuis. Il a commencé avec trois amis du lycée : Jean-Mathieu Clavier, Nathan Clavier et François-Xavier Laurent. Entre la cave de leurs parents respectifs et les ateliers dans la salle de musique du Gymnase, le destin les a menés vers des horizons inattendus.

Et le mail d’un professeur japonais…

En 2020, alors qu’ils avaient écumé les salles de Strasbourg et alentours et que le COVID frappait à la porte, ils découvrent le mail Yutaro Yoshihara, professeur de danse à Osaka au Japon. Il coache un groupe de jeunes filles qui souhaite utiliser un de leurs morceaux, le très très dansant Do it, pour une compétition de "locking" au Japon, le Dance Stadium, un concours interlycées  C'est alors que les trois amis se découvrent un réel public au Japon. Des dizaines et des dizaines de danseurs et danseuses utilisent leur musique, jusqu'à des plateaux tv prestigieux tels que le Japan Dance Delight.

A retrouver en https://www.youtube.com/watch?v=UTmLAvSjm6c


À l'heure où les concerts sont à l'arrêt en Europe, c'est une nouvelle perspective de développement qui se dessine pour eux. Ils découvrent la City-Pop et l'Acid-Jazz japonais qui deviendront par la suite des influences majeures dans leur musique. 

Ils démarrent alors plusieurs collaborations avec des artistes japonais et japonaises, s’entourent de
partenaires clefs au Japon (manager, éditeurs, distributeurs, etc.) et commencent à travailler en 2022 sur un disque hommage à la City-Pop, en collaboration avec 5 chanteuses japonaises emblématiques de cette scène. 

Scènes japonaises

Le travail autour de ce territoire et de ce disque les amène en juin 2023 à leur première tournée organisée au Japon, 9 dates sur 15 jours entre Osaka et Tokyo, en passant par les principales villes du centre de l'île. La tournée se termine avec la sortie de leur disque Midnight City Lovers le 21 juin 2023 à Tokyo, où ils ont pu partager la scène avec tous les artistes ayant collaboré au projet.

Cette histoire a été racontée dans un documentaire (France Télévision) de 52 minutes qui retrace toutes les étapes de ce périple, de la découverte du public à la date à Tokyo. Le documentaire est sorti en juin 2024 sur France3 et France.tv avec une avant-première diffusée dans la grande salle du cinéma Star St-Exupéry.

A retrouver en : https://www.youtube.com/watch?v=ellu3jhyRpM 

Ce développement leur a ouvert de nombreuses opportunités, les collaborations ont continué avec des artistes à travers le monde. Ils ont effectué une deuxième tournée en Asie en octobre 2024 passant par le Japon, Taïwan, l'Indonésie et le Vietnam sur un période de 5 semaines. Ils ont développé une véritable fanbase sur ces pays. Leur développement en Europe a également continué avec des séries de dates en France, en Allemagne et en Italie notamment. 

Ils arrivent à présent à la fin d'un cycle de 5 années pendant lesquelles ils se sont incroyablement développés, grâce à leurs expériences, grâce à la rencontre avec tant de personnes, grâce aux 14 artistes avec lesquels ils ont collaboré, grâce aux milliers de personnes qui se sont déplacées pour venir les écouter. 

Et l’avenir :

C'est pourquoi ils travaillent actuellement à la suite, leur prochain disque, leurs prochains projets, leurs prochaines tournées, toujours orientés vers l'Asie et le Japon, mais également sur l'Europe.

Ainsi, ils cherchent à développer leurs moyens de financements, via, notamment des campagnes de financements auprès de particuliers et d'entreprises, afin de pouvoir continuer leurs ambitieux projets à l'international.

Pour mener à bien tous ces projets, ils ont monté en août 2020 une structure : Original Tape Records.


Celle-ci leur a permis de travailler sur leur développement, en totale indépendance et de choisir les partenaires avec qui ils souhaitaient avancer et les projets artistiques qu’ils voulaient défendre. Ils ont effectué une demande de rescrit fiscal qui les a rendu aptes, en tant qu'association, à délivrer des reçus de dons ouvrant droit à une réduction d'impôts. 

Ils en appellent donc aujourd'hui à la générosité de donateurs et donatrices qui voudraient les soutenir dans le développement de la scène culturelle strasbourgeoise et son rayonnement à l'international, tout en profitant d'une réduction d'impôts. 

Tout don effectué auprès de l'association Original Tape Records ouvre droit à une réduction de 66% du montant du don effectué par des particulier et  de 60% du montant du don effectué par des entreprises 

En contrepartie ils peuvent également vous faire parvenir des exemplaires de leurs précédents albums en format CD ou vinyle (dans la limite de 25% du don). 

Si vous souhaitez les soutenir ou que vous avez des questions sur les dons, envie d'échanger autour du projet ou simplement prendre contact avec eux, n'hésitez pas à revenir vers François-Xavier Laurent par mail : fx@originaltaperecords.com ou par téléphone : 07 71 62 71 43. 

Laissons à François-Xavier Laurent le mot de la fin :

Merci d'avoir pris le temps de lire notre histoire, en espérant que cette lecture vous aura permis de vous évader un peu dans ce mois de septembre bien chargé, puisque c'est pour ça que nous faisons ce métier, raconter des histoires à notre public afin qu'ils puissent s'évader

Et aussi, leur aventure les yeux éveillés: